Blades of Fire : Premières impressions sur le dernier jeu des créateurs de Metroid Dread
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Rédigé par Nathan Champion
Studio espagnol fondé en 2002, MercurySteam Entertainment a depuis accouché d’une petite dizaine de jeux, la plupart plutôt bien reçus par la critique. Parmi eux, le sympathique Castlevania : Lords of Shadow et sa suite, Clive Barker’s Jerrico, ou encore l’oublié Scrapland. Mais ce que l’on retient le plus de son CV, c’est bien entendu son remake de Metroid 2 à destination de la 3DS, et surtout Metroid Dread, un épisode fort bien accueilli de la franchise de Nintendo. Entreprise de faiseurs qualifiés, MercurySteam peut compter sur ses riches idées de Game Design pour marquer les esprits à chaque sortie. Pourtant, à première vue, Blades of Fire, son prochain jeu, se contente de faire du Souls-like, comme bien trop d’autres développeurs avant cela.

Fort heureusement, bien que les fondations du projet reposent en effet sur une recette connue et éculée, MercurySteam a su insuffler à Blades of Fire un élan de fraîcheur dont ses équipes ont le secret. Non content de disposer d’un univers bien à lui, et d’un niveau de finition qui l’honore, le titre peut compter sur des mécaniques neuves, et très intéressantes de surcroît. C’est en tout cas ce qui ressort de notre longue session de jeu, s’étant étalée sur une grosse vingtaine d’heures, au cours desquelles nous avons sué sang et eau, mais surtout pris beaucoup de plaisir. Malheureusement, par manque de temps, nous n’étions guère en capacité de terminer le jeu avant la parution de cet article, qui se concentrera sur nos premières impression détaillées.
Conditions de test : Nous avons reçu un code pour la version PlayStation 5 du jeu, et avons passé une grosse vingtaine d’heures dessus. Cet article est garanti sans spoiler majeur.
Fragments d’un paradis
Blades of Fire fait le choix d’un postulat plutôt simple, sans grande fioriture. Le protagoniste, Aran, semble vivre une vie simple, reclus dans les bois. Quand un jour, entrent sur ses terres des soldats décidés à lui ôter la vie, il se voit contraint de se battre. Après la mêlée, il tombe sur un jeune et un vieil hommes, aux prises avec d’autres assaillants. Sauvant le premier, il constate, trop tard, que le second n’était autre qu’un ami de longue date. Celui-ci était visiblement à la recherche d’Aran, qu’il croyait seul être capable de mettre un terme au règne despotique de la reine. Une sorcière dont un sort surpuissant parvint à transformer tout métal (ou presque) en pierre.
L’histoire de Blades of Fire ne sera assurément pas sa plus grande force, et fait à première vue plus office de prétexte un peu bateau que de véritable raison à proprement parler de s’investir dans le jeu. Néanmoins, nous avons été surpris de constater que la petite galerie de personnages que nous avons pu rencontrer ne manquait pas d’intérêt, et savait se mettre en scène. De surcroît, nos deux protagonistes entretiennent une relation juste, amicale, et un certain secret quant à leurs origines respectives, qui donnent envie d’en savoir plus à leur sujet, et de voir évoluer leur amitié. Ce à quoi contribuent les doublages de très bonne facture, exclusivement en anglais, et une écriture très honnête, auxquels s’ajoute une bande son qui nous a beaucoup plu.
Quitte à rester dans la réalisation, abordons rapidement la question des graphismes de ce Blades of Fire. Loin du triple A, le titre propose toutefois un univers riche visuellement, plein d’une végétation un peu folle, mettant l’accent sur la nature et les matières nobles. Un parti pris qui, en dépit d’une technique un peu vieillissante, lui confère un aspect charmant. Le titre tourne par ailleurs très bien, et nous n’avons constaté aucune chute de framerate désagréable. Nous avons aussi beaucoup apprécié le bestiaire bien fourni, et parfois assez original. S’il est évident que les patterns et l’IA ennemis ne révolutionnent rien, le tout fonctionne toutefois à merveille mis bout à bout, et nous n’avons constaté aucun véritable manquement ou problème à ce niveau, si ce n’est, peut-être, un manque de renouvellement sur la durée (à vérifier arrivé au bout de l’aventure, bien sûr).
Puisqu’il faut bien aborder l’éléphant dans la pièce, alors oui, Blades of Fire pourrait être qualifié de Souls-like par ceux qui souhaiteraient faire de la vue facilement sur le net, ou n’ayant pas touché au titre. Toutefois, le dernier projet de MercurySteam est bien plus que cela. Oui, d’une certaine façon il reprend un peu la construction d’un Dark Souls, avec ses zones interconnectées, au Level Design d’ailleurs irréprochable, parfois très surprenant. On découvre de nombreux raccourcis à débloquer, et l’exploration est le maître mot, même si le jeu est très loin du monde ouvert à la Elden Ring, avec ses zones certes grandes mais fermées. Un système vaguement comparable aux feux de camp est de la partie, ressuscitant les ennemis tués chaque fois que l’on décide de se reposer.
Toutefois, la comparaison s’arrête là. Blades of Fire laisse plus l’impression d’un Action-RPG un peu ardu que d’une pâle copie de jeu From Software, comme on en a beaucoup trop mangé sur les dix dernières années (et tout porte à croire que ce n’est pas fini). Un Action-RPG assez old school, d’ailleurs, parcouru d’une vibe qui rappelle beaucoup les projets de l’ère Xbox 360 / PlayStation 3, tels que le très sympathique Kingdoms of Amalur. Ce qui est à voir comme une qualité, puisque le jeu s’avère ainsi dépaysant, rafraîchissant même, au sein d’une offre vidéoludique qui, ces derniers temps, tourne peut-être un peu en rond.
Neige sur la forge
Mais c’est bien sûr dans le cœur de son gameplay que Blades of Fire est le plus original, inventif, et intéressant. Ici, contrairement à la majeure partie des Action-RPG, pas d’expérience à glaner en terrassant des ennemis, mais des matériaux et de précieuses informations, qui permettront par la suite de se forger de nouvelles armes. Tout le jeu tourne autour de ces armes, qu’il faut se confectionner soi-même, et dont il faut découvrir les plans en tuant un certain nombre d’ennemis précis. Un mode de progression qui s’avère gratifiant. D’autant que l’on peut tout de même faire évoluer son personnage, grâce à différents items qu’il faudra trouver au sein des décors, parfois fort bien cachés. Gratifiant, là encore.
Le système de combat ne manque pas d’originalité, lui aussi, proposant quatre touches d’attaque pour quatre angles (haut, bas, gauche, droite), mais aussi, selon les armes, plusieurs modes d’attaque. La grosse particularité, c’est que certaines armes seront plus ou moins efficaces selon les ennemis, voire simplement sur certaines parties du corps exclusivement. Certains adversaires, pourvus d’une armure épaisse, ne pourront être terrassés à l’aide d’épées, par exemple, ce qui se traduit par une aura rouge les entourant. Il va alors falloir opter pour une autre approche. Une massue, pourquoi pas, ou bien une arme qui parviendra à passer outre ladite armure.
Les possibilités sont assez vastes, et grandissent à mesure que l’on avance dans le jeu et que l’on obtient de nouveaux plans d’armes. Le nombre total d’armes à découvrir est assez vertigineux, d’autant que les manières de les jouer sont bien différentes, et promet une variété d’approches tout bonnement folle. Mais aussi, le gameplay en lui-même est grisant, parfois jubilatoire. Même si les combos ne sont pas extrêmement longs ni fournis, et que l’on se retrouve avec un mélange esquives / parades pour la défense ou une jauge d’endurance très classique, le titre parvient à conserver l’intérêt sur la durée, notamment en augmentant la vélocité des adversaires. S’il n’est pas facile, Blades of Fire n’est toutefois pas injuste, et nous, qui ne sommes guère adeptes des Souls ou des jeux punitifs de manière générale, n’avons jamais été frustrés par la proposition.
Ce qui n’était pourtant pas gagné, puisque Blades of Fire embarque un système de durée de vie limitée pour ses armes, qui finissent par se briser si nous les utilisons trop souvent, en commençant parfois par s’émousser, ce qui fait chuter leurs dégâts. Mais nous sommes loin de ce que propose un The Legend of Zelda : Breath of the Wild à ce niveau, heureusement. On a le temps de voir venir la mort de nos armes, qu’il est possible de réparer moyennant un certain coût, du moins seulement un certain nombre de fois. Et c’est là qu’entre en jeu la plus grosse originalité du jeu, mais aussi, d’une certaine manière, son système le plus clivant.
Comme dit plus tôt, Blades of Fire propose au joueur de forger ses propres armes. Un système qui aurait pu rester en surface, passer par des menus et se terminer par une conception en contrechamp, comme dans une quantité incalculable de titres du genre. Toutefois, MercurySteam a choisi de faire tout l’inverse : mettre l’accent sur le façonnage de ses armes. Ce qui passe par un choix assez vaste dans les matériaux à utiliser, les formes à adopter pour les lames, faisant varier les caractéristiques de l’objet, des dégâts jusqu’au coût en endurance, en passant par la pénétration d’armure. Ensuite, il faut tout bonnement mettre la main à la pâte, en empoignant nous-mêmes le marteau du forgeron, afin de modeler le métal selon les courbes définies.
Un modelage harmonieux, et un certain nombre de coups de marteau, définissent le nombre d’étoiles que possède l’arme, pouvant monter jusqu’à quatre. Chaque étoile correspond à une possibilité de réparer l’arme. Ainsi, on s’attache peu à nos outils de mort, puisqu’on prend finalement plaisir à en forger de nouveaux, avec des matériaux plus résistants fraîchement acquis. La sensation de montée en puissance dépend alors de notre propension à forger régulièrement, ou non, mais nous a semblé particulièrement juste, là aussi assez grisante. Un boss vous pose problème ? Revenez simplement à une enclume, forgez une masse d’arme surpuissante, et brisez lui les jambes !
S’il demeure difficile de déterminer avec précision comment évoluera l’aventure au delà de la vingtaine d’heures que nous avons passé dessus, il nous semble toutefois évident que Blades of Fire est une très bonne pioche, même sans avoir vu les crédits de fin. Peu de choses nous semblent à redire, à ce stade, d’autant que le titre nous a semblé bien fini. Avec sa proposition originale juste ce qu’il faut, un brin old school, et surtout rafraîchissante comme trop peu de projets ces derniers temps, le dernier jeu de MercurySteam a toutes les chances de trouver son public. A fortiori dans la mesure où il peut se targuer d’un prix de vente assez doux.