Silent Hill f : On a joué 4 heures, trop d’action pour un Silent Hill ?
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Rédigé par Quentin
Après le succès de Silent Hill 2 Remake, Konami semble avoir relancé la licence sur de bons rails, l’occasion idéale de sortir un nouvel opus. Silent Hill f prend un tournant audacieux en retrouvant ses racines japonaises et en ajoutant un gameplay laissant plus de place à l’action, chose qui n’a pas manqué de faire débat parmi les fans. Nous avons pu jouer aux quatre premières heures du survival horror, et même si l’on avait des inquiétudes, il semble que l’on soit face à une belle surprise.

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Avec Silent Hill f, Konami a souhaité renouer avec l’horreur à la japonaise, un aspect que la série avait trop mis de côté au profit d’une vision plus occidentale, selon le producteur Motoi Okamoto. C’est aussi pour cette raison que le développement a été confié au studio taïwanais Neobards. L’intrigue se déroule dans les années 60, au sein d’une ville fictive japonaise appelée Ebisugaoka, inspirée de la véritable ville de montagne Kanayama. Le titre cherche ainsi à retrouver une atmosphère mêlant à la fois horreur et beauté, une dualité symbolisée par les lycoris rouges qui ponctuent l’exploration et qui sont à la fois fascinantes et intimement liées au danger.
Fidèle à l’ADN de Silent Hill, le récit est cryptique, mais dans un style différent car porté par un scénariste reconnu dans l’univers des visual novels horrifiques. Ceux qui apprécient le travail de Ryukishi07 (Higurashi no kokoroni, Umineko…) seront ravis d’apprendre que sa patte transparaît pour le meilleur. À commencer par l’héroïne, Hinako, qui détonne, se traduisant par une histoire fragmentée, où la perception de notre protagoniste peut être trompeuse. Ainsi, nous ne sommes jamais certains de ce qu’elle voit ou entend. En bref, il y a constamment une ambiguïté narrative qui fonctionne bien en accentuant l’incertitude (et donc l’angoisse et la peur) tout en nous donnant envie d’en savoir plus.
Le quotidien de la lycéenne bascule lorsqu’un mystérieux brouillard s’empare de la ville. Dès les premières minutes, on déambule dans ce petit village aux rues étroites, avec des routes sinueuses et des coins de campagne. Le charme visuel et l’ambiance opèrent immédiatement : Ebisugaoka respire l’authenticité, riche en décors variés et en détails, même pour qui n’a jamais vécu dans un village japonais. Silent Hill f se présente ainsi comme une belle vitrine pour l’Unreal Engine 5 (qui est de plus en plus utilisé sous une forme assez générique selon nous), grâce à ses textures fines, ses éclairages naturels et une gestion du brouillard saisissante, un clin d’œil évident à l’un des symboles de la franchise.
D’ailleurs, le jeu met en avant les fondamentaux de la série malgré son esthétique japonaise moderne. Régulièrement, nous sommes aussi amenés à explorer un autre monde. Sorte de véritable miroir cauchemardesque de la réalité, ces lieux délaissent les couloirs industriels rouillés des épisodes américains pour se muer en complexes de sanctuaires traditionnels corrompus. Autre marque de la franchise, les puzzles psychologiques qui gardent également leur importance. Ces énigmes sont d’ailleurs souvent liés aux personnages ou a des métaphores obscures. L’un des exemples frappants a été celle des épouvantails où l’on devait trouver le bon en se mettant à la place d’une jeune fille sous peine de se faire attaquer par les autres si l’on choisit le mauvais. Enfin, tradition oblige, plusieurs fins alternatives sont prévues.
N’oublions pas non plus les musiques et le sound design, qui jouent un rôle essentiel dans les différents jeux de la série. D’ailleurs, Akira Yamaoka est de retour aux commandes (aux côtés de Kensuke Inage) avec une bande-son mêlant malaise et mélancolie. L’ambiance musicale, portée par des instruments et chants traditionnels japonais, participe activement à l’immersion. Le son constitue sans doute l’un des atouts majeurs de la peur qui accompagne la progression, puisqu’il faut analyser chaque bruit, aussi anodin soit-il, pour éviter d’être pris en embuscade par des ennemis bien dissimulés. Chaque son suscite ainsi une incertitude constante sur ce qui pourrait survenir dans les secondes ou minutes qui suivent.
Silent Hill fait trop dans l’action ?
De manière générale, les puzzles sont bien équilibrés. Ce n’est pas du tout cuit, mais jamais trop compliqué non plus. Et même lors de ces moments de réflexion où l’on pense être au calme, les monstres ne manquent pas de maintenir la tension, apparaissant sans cesse, comme ce fut le cas pour une énigme dans l’autre monde où un ennemi immortel revenait en boucle. L’interface inclut un journal manuscrit et une carte griffonnée qui aident à ne pas se perdre, au sens propre comme au figuré.
Ce que l’on craignait pour ce nouvel opus, comme beaucoup de fans, c’était l’importance que pourrait prendre l’action avec un système de combat souvent comparé à celui des Souls-like. Après quatre heures de jeu, on peut affirmer que ce n’est pas le cas. Silent Hill f ne prend pas non plus un virage à la Resident Evil et préfère une approche de l’action qui sert avant tout à accentuer la tension. Malgré une certaine rigidité, plutôt cohérente avec le fait que l’on incarne une lycéenne (certes athlétique pour son âge, mais loin d’être toute-puissante), le jeu propose un système de combat au corps-à-corps exigeant, avec coups faibles et puissants, esquives parfaites, contre-attaques, gestion d’endurance et timing précis.
Cela ne veut pas dire que tout est parfait côté sensations. On ressent encore quelques lourdeurs, notamment dans les collisions. En outre, Hinako ne peut utiliser que des armes de mêlée, lesquelles se brisent au fil de leur utilisation. Bien qu’il soit possible de les réparer à l’aide d’une boîte à outils, ces consommables semblent suffisamment rares pour ne pas trop s’y reposer. Cela dit, après quatre heures de jeu, ce système ne nous a pas semblé frustrant. Rassurez-vous, on n’est clairement pas au niveau d’un Breath of the Wild de ce côté-là.
Si certains pourraient penser que cette dose d’action nuit à l’ambiance, on estime au contraire qu’elle s’intègre plutôt bien grâce à quelques choix de game design judicieux. D’abord, les ennemis ne laissent aucun loot, il n’y a donc rien à gagner à tous les vaincre. Au contraire, on comprend vite qu’il est souvent préférable d’éviter le combat. On se bat uniquement lorsque c’est indispensable ou pour explorer une zone plus sereinement. Certains mini-boss donnent même lieu à de véritables séquences de survie, comme ce passage où l’on devait tourner une manivelle tout en fuyant une créature imbattable.
Silent Hill ftw ?
Enfin, les combats ont une influence directe sur la gestion des ressources, en instaurant une prise de risque constante. L’un des systèmes centraux de Silent Hill f repose sur la relation entre la Foi, les objets, et les statistiques. Les offrandes (les consommables ici) disséminées dans les environnements peuvent être déposées dans des sanctuaires pour être converties en Foi, une ressource spirituelle permettant de tirer des omamori, des talismans conférant des bonus passifs (meilleure esquive, discrétion accrue, etc.) ou d’améliorer durablement les statistiques de la jeune fille.
La survie repose aussi sur trois jauges distinctes : la vie (santé physique), la santé mentale (qui se dégrade au contact du surnaturel et altère la perception du monde via hallucinations, sons distordus…), et l’endurance (qui régit toutes les actions physiques comme courir, esquiver, frapper). La synergie entre ces jauges et le système de Foi confère une vraie profondeur stratégique, instaurant un dilemme constant : vaut-il mieux conserver un objet pour se soigner plus tard, ou le sacrifier afin de renforcer durablement ses capacités ?
Pour ceux qui voudraient uniquement profiter de la narration et de l’ambiance, Silent Hill f inclut une difficulté histoire qui réduit la difficulté des combats et met de côté la gestion de la santé mentale. Par exemple, chaque arrêt à un sanctuaire (où l’on sauvegarde notamment) renfloue automatiquement la santé mentale contrairement au mode équilibré – difficulté sur laquelle nous avons joué durant ces quatre heures. Que ce soit en matière de gestion de ressource et d’affrontement, Silent Hill f ne manque clairement pas de challenge et les boss peuvent s’avérer particulièrement difficile comme celui que nous avons affronté à la toute fin de cette démo.
Après quatre heures passées à arpenter les ruelles brumeuses d’Ebisugaoka, difficile de ne pas être intrigué par ce que propose Silent Hill f. En mêlant une ambiance horrifique profondément japonaise, une narration tortueuse et un gameplay qui jongle entre survie, exploration et tension permanente, ce nouvel opus réussit à se distinguer tout en respectant l’ADN de la licence. Certes, quelques lourdeurs subsistent et l’orientation plus axée sur l’action divisera sans doute, mais Konami semble avoir trouvé un équilibre qui pourrait bien surprendre les plus sceptiques. Si la suite du jeu maintient cette intensité et cette atmosphère oppressante, Silent Hill f a toutes les cartes en main pour marquer un véritable renouveau dans la saga.