Dispatch : On a joué aux premiers épisodes de ce jeu narratif super-héroïque façon Telltale, nos impressions
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Rédigé par Jordan
Peut-on, en 2025, encore s’aventurer dans un format épisodique à la Telltale quand le public semble bouder la formule ? La question est en réalité la même que celle de la présence des super-héros au cinéma. Il n’est pas tant question d’une fatigue du format, mais d’une pratique qui n’a pas été assez retravaillée au fil des années. Et qui de mieux que des anciens de Telltale pour bousculer tout cela ? Adhoc Studio est en effet né sous l’impulsion d’ancien artistique du studio iconique, avec bon nombre d’employés ayant travaillé sur The Wolf Among Us ou Tales of the Borderlands. Et alors que le « vrai Telltale » patine de son côté à donner vie à un The Wolf Among Us 2 qui se fait trop attendre, Adhoc montre avec Dispatch que le jeu narratif épisodique n’est pas mort : il avait juste besoin d’un bon coup de pied au cul.

Conditions d’aperçu : Nous avons pu jouer à la moitié de la saison de Dispatch, soit les épisodes 1 à 4. L’embargo étant limité aux deux premiers épisodes, nous n’aborderons les détails que de ces deux premiers (les images sont aussi issus des épisodes 1 & 2), sans spoils, tout en donnant un avis global sur cette moitié de saison.
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ToggleL’homme derrière la machine
Si vous avez consommé n’importe quel contenu de super-héros ces dernières années, Dispatch vous parlera. Évoquant tantôt Marvel, puis Invincible, et plus légèrement The Boys, le jeu de Adhoc Studio ne cache clairement pas ses influences et s’inscrit dans l’air du temps en proposant une vision critique des super-héros, avec une société dysfonctionnelle qui tourne autour de ces surhumains. L’angle choisi dans cet univers est tout de même intéressant.
Vous incarnez ici Robert Robertson, qui, en plus de posséder un nom qui attire toutes les moqueries, est un super-héros tombé en disgrâce. Aussi connu sous le nom de Meca-Man, sorte d’Iron Man si Tony Stark avait gardé sa toute première armure, il se voit être contraint de partir à la retraite un peu plus tôt que prévu suite à une rencontre malchanceuse avec un super-vilain.
Pour se refaire une santé, il est recruté par une agence de super-héros en tant que « dispatcheur », soit un agent de communication placé à la tête d’une équipe de super-héros, qu’il doit gérer depuis son bureau en les envoyant effectuer les bonnes missions. Et puisque la malchance le poursuit, il est placé aux commandes de la Team Z, soit les nuls parmi les nuls, des super-vilains reconvertis en super-héros dans l’espoir de ne pas finir en prison. Vous devrez composer un homme chauve-souris loin d’être Batman, une guerrière démoniaque aux pouvoirs évoquant Magik, une voleuse invisible très vulgaire, une pop-star trop sûre d’elle… Une Suicide Squad en sorte, sans la bombe dans la tête et avec des horaires de bureau convenables.
Des fonctionnaires comme les autres
Car malgré tout ce contexte super-héroïque, Dispatch veut vous ancrer dans une vie de bureau. Entre les rencontres gênantes dans les toilettes, les engueulades dans la salle de repos, les vols de matériel, tout y est, super-humains ou non. Un moyen parfait pour rendre ces personnages plus terre-à-terre, et plus humains. Plus drôles aussi, ce que l’on doit à un timing des dialogues impeccables, ainsi qu’à un langage naturel et des répliques crues. Adhoc se limite dans la représentation de la violence, mais n’hésite pas à pousser le curseur de la grossièreté au maximum, sans que cela paraisse forcé.
Tout n’est pas surprenant ni riche en sous-textes, sans doute la faute au genre super-héroïque éculé ou au format de la narration qui se repose sur des choix (et est donc moins maitrisée qu’un récit plus dirigiste). On ressent également le manque de temps pour développer certains personnages, ce qui sera peut-être rattrapé dans la seconde moitié de la saison. Mais ne boudons pas notre plaisir pour autant. Dispatch offre une expérience très divertissante, au point où un épisode d’une heure nous semblera durer trois fois moins de temps.
Et tout cela donne vue à un casting impeccable, servi par des doubleurs au top. On le doit en partie au collectif Critical Role, qui a aussi participé à l’élaboration du jeu, étant donné que Adhoc va développer un jeu sur Exandria, l’univers créé par le groupe (et on a déjà hâte de voir ça). Avec Laura Bailey (Abby dans The Last of Us Part II) ou Travis Willingham (Thor dans Marvel Rivals) en passant par Matthew Mercer (Vincent dans Final Fantasy VII Rebirth), ces professionnels du doublage soutiennent avec justesse cette bonne écriture. Même chose pour Aaron Paul et Jeffrey Wright, et même pour celles et ceux qui viennent du monde de YouTube (MoistCr1TiKaL, Jacksepticeye…) et qui démontrent ici qu’il n’est pas juste question de « star talent ».
Une vie de bureau qui n’est pas de tout repos
Malgré ce coup de pied dans le périnée évoqué plus tôt, Dispatch transpire la formule Telltale par tous les pores. Impossible de se défaire de l’idée que l’on joue ici à un titre qui rend tous les codes de la formule, avec des tas de dialogues à choix aux conséquences plus ou moins directes. Même le découpage est quelque peu prévisible ici. Pour peu que l’on ait l’expérience de The Wolf Among Us, la structure du récit est évidente, tout comme le timing des choix cruciaux.
Alors, qu’est-ce qui change ? Eh bien, hormis l’aspect visuel saisissant du jeu, son gameplay. Dispatch ne nous donne pleinement les commandes que lorsque Robert effectue son travail. Cela se traduit par une partie gestion dans laquelle vous devez assigner vos super-losers au bon endroit, selon les forces et faiblesses de chacun.
Un principe simple, qui se complexifie assez vite. Choisir les bonnes personnes n’est pas toujours évident, dans la mesure où le jeu fait preuve d’un peu de subtilité par rapport aux tâches demandées. Vous devrez parfois envoyer plusieurs agents pour compléter les forces de chacun, mais ça, c’est si vous le pouvez. En dehors des problèmes d’emploi du temps, certains agents refuseront occasionnellement de participer aux missions, ou pourront la mettre en péril. Car même si vous n’êtes que devant un écran de gestion sobre au possible, l’histoire continue et les dialogues fusent durant cette partie.
Au fil des épisodes, la gestion s’intensifie avec des doubles demandes, des énigmes à résoudre, ou encore des agents qui vont gagner des capacités très spéciales à utiliser à bon escient. Ajoutez à cela un mini-jeu de hacking, tout simple en apparence, qui, lui aussi, gagne en complexité au fur et à mesure que les épisodes progressent. Quelques séquences cinématiques viennent ajouter un peu d’interactivité, mais elles restent en nombre très réduit.
Dispatch se montre économe ici, sans doute pour son plus grand bien. Tout ce qu’il fait, il le fait bien. Et c’est tout ce que lui demande après une première moitié de saison qui démarre très bien, et qui prouve que le genre a encore quelque chose à offrir lorsqu’il est maitrisé. En témoigne notre grande impatience à l’idée de découvrir les prochains épisodes. Pour rappel, les deux premiers épisodes de Dispatch seront disponibles dès le 22 octobre, sur PC et PS5. Deux épisodes sont prévus par semaine, pour une saison de 8 épisodes, ce qui veut dire que la saison sera complète dès le 12 novembre.