King of Meat : notre interview avec Mike Green et Jonny Hopper du studio Glowmade
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Rédigé par Quentin
Après une preview prometteuse de King of Meat lors du Summer Game Fest, nous avons pu échanger avec les deux cerveaux du projet : Jonny Hopper (directeur du studio Glowmade et directeur technique sur King of Meat) et Mike Green (Creative Director sur King of Meat). Ensemble, ils reviennent sur la genèse de cet OVNI vidéoludique mêlant hack’n’slash et création communautaire à la Mario Maker. Entre inspirations loufoques, ambitions coopératives et volonté de bâtir un jeu pensé pour durer, ils nous dévoilent les coulisses de King of Meat.

Imaginé comme une parodie des jeux de création et d’action en coop, King of Meat mêle esthétique de spectacle télé, humour absurde et mécanique de création poussée. Pour en savoir plus sur nos impressions, nous vous renvoyons à notre preview sortie récemment. À l’occasion d’un entretien avec Jonny Hopper et Mike Green de Glowmade, nous avons pu revenir sur la genèse du jeu, l’univers de Loregok, le calibrage de la difficulté, les outils de modération ou encore les possibilités offertes par le mode création de donjons.
La génèse et la philosophie de King of Meat
D’où vient l’idée de King of Meat, ainsi que le nom (assez unique en son genre) ?
Jonny Hopper : L’idée est née un soir au pub, pendant qu’on discutait des types de jeux qu’on aimerait bien jouer ensemble. On voulait créer un jeu en coop, alors on a commencé à parler de trucs qu’on aimait à ce moment-là, comme le catch, la WWE… On adorait tout le côté spectaculaire de ce genre de choses. Et Adam, notre directeur artistique, était fan de films comme Labyrinth de Jim Henson, des vieux classiques.
On s’est demandé à quoi ressemblerait un jeu coopératif qui mélangerait tout ça, et c’est vraiment ce qui a lancé le projet. Pour ce qui est du nom… en fait, personne ne sait vraiment d’où il vient. Ce qu’on sait, c’est qu’on avait déjà ce nom, King of Meat, et à un moment on s’est dit “Et si on l’appelait comme ça ?”. Alors on a trouvé plein d’autres idées… mais elles étaient toutes nulles. Du coup, on a gardé King of Meat.
- Comment vos expériences sur des jeux comme Fable et LittleBigPlanet ont-elles façonné votre philosophie ici ?
Jonny Hopper : La chose la plus importante quand on crée un jeu avec un certain niveau de contenu généré par les joueurs, c’est de ne jamais oublier que ça reste un jeu. Et qu’un jeu, ça doit être fun. C’est vraiment notre philosophie de base, ça doit avoir le ressenti d’un jeu, pas d’un travail. Il ne faut pas que ça ressemble à un logiciel de modélisation 3D ou un outil complexe. Il faut que ce soit quelque chose qu’on prenne plaisir à faire.
Mike Green : Il fallait aussi que ce soit accessible, pas trop intimidant pour quelqu’un qui n’est pas habitué aux modes créatifs. On a donc conçu le système pour que tu puisses créer un donjon en quelques minutes, et le tester tout de suite. Ensuite, si tu veux passer plus de temps, tu peux peaufiner, ajouter des décorations, modifier le sol, ou encore placer un interrupteur pour ouvrir une porte. Mais ce qui comptait vraiment pour nous, c’était d’éviter cette sensation de page blanche qui peut rebuter dans certains jeux. On voulait que ça donne envie de construire un donjon dans l’univers de King of Meat.
- Loregok semble absurde, fun et étrangement cohérent. Comment avez-vous abordé la création de ce monde, narrativement parlant ?
Jonny Hopper : Je dirais que ça s’est fait assez naturellement. On n’a pas vraiment suivi un processus structuré pour créer cet univers. On a simplement commencé à lancer des idées. À l’origine, le monde de King of Meat était centré sur un seul et unique truc : ce jeu. Toute la société était obsédée par King of Meat.
On a ensuite imaginé ce que ça donnerait si on mélangeait des vêtements de sport avec de l’esthétique médiévale, en y ajoutant une touche de célébrité, de paillettes et de glamour. Et à partir de là, tout s’est développé. Par exemple, le hub social du jeu, la grande place, était à la base juste un pub. Tu étais dans un bar, tu descendais au sous-sol, et tu jouais. Mais au fur et à mesure qu’on imaginait ce que le jeu pouvait devenir, le lore et l’univers se sont étoffés avec.
Mike Green : C’est un monde qui nous permet de nous moquer de nous-mêmes, de ce qu’on fait, de manière très libre. À la base, on s’est simplement posé la question : “Et si le monde ne connaissait qu’une seule forme de divertissement ?” Ce que vous voyez dans le jeu aujourd’hui, c’est un peu la réponse à ça.
Jonny Hopper : Je ne me souviens plus vraiment d’où vient l’idée que la magie est illégale. C’était juste un délire lancé comme ça, et quelqu’un l’a repris au vol. Pareil pour les squelettes qui réclament leurs droits ! On ne cherche pas forcément à faire passer un message politique, on trouvait juste ça drôle et un peu absurde.
Mike Green : Il est nécessaire d’avoir des conflits car c’est ce qui rend les histoires intéressantes.
Jonny Hopper : Et puis il y a eu la chanson caritative pour les squelettes. Parce qu’on en tue tellement dans le jeu… il fallait bien qu’ils aient un peu de soutien. Ce qu’on trouve le plus drôle, c’est que tout est une mise en scène. C’est un show, un jeu. Toute cette boucherie, c’est pas réel. Tout le monde joue un rôle. Tu peux aller en coulisses, parler à un squelette qui te dit “J’ai mal au dos aujourd’hui, ma femme me prend la tête, mais bon, faut que j’aille me faire trucider encore une fois…” C’est cette idée que tout est du faux, du théâtre, qui rend les choses plus légères. Si c’était réel, ce serait juste horrible. Mais là, comme tout est simulé… ça devient presque joyeux.
Mike Green : Bon, cela dit, on les recolle vraiment après.
Un outil de création de donjon simple à prendre en main et profond sur le papier
- Il y a un système de scoring pour obtenir des trophées (bronze, argent et or). Comment avez-vous calibré la difficulté ?
Mike Green : C’est un jeu coopératif, mais tu veux quand même être le meilleur du groupe, forcément. Cela dit, on a vraiment voulu faire en sorte que tu n’aies pas besoin d’être un hardcore gamer pour t’amuser. Tu peux très bien bourriner les boutons et passer un super moment avec tes amis.
Mais si tu prends le temps d’apprendre le système de combos, de comprendre comment projeter les ennemis en l’air, comment les jongler et laisser tes coéquipiers enchaîner pendant ce temps-là… là tu vois ton score grimper. Et si tu arrives à maintenir ton multiplicateur, une fois que tu es dans le flow d’un donjon, tu peux vraiment commencer à atteindre des scores élevés, à débloquer les médailles argent et or.
Chaque donjon est un peu différent, donc les scores peuvent énormément varier. Si tu entres dans un donjon orienté puzzle, les seuils de score sont en général un peu plus bas. Mais si tu te lances dans un donjon très axé combat, tu peux voir des scores complètement fous, genre 300 000 points, et te demander “Comment on va faire pour atteindre ça ?!”
- Concernant l’outil de création, avez-vous un système de modération pour éviter les niveaux trolls ou encore des exploitations pour du farming etc. ?
Jonny Hopper : On s’est beaucoup concentrés sur deux choses : proposer une expérience de qualité, mais aussi une expérience sûre. Par exemple, la première règle, c’est que tu ne peux pas publier un niveau que tu n’as pas terminé toi-même. C’est la base. Si quelqu’un crée un niveau absurde ou impossible à finir, il ne pourra tout simplement pas le mettre en ligne. Une fois le niveau validé, il peut apparaître dans la section “découverte”, où on retrouve tous les nouveaux contenus. Mais au-delà de ça, on a mis en place pas mal d’outils pour garantir la sécurité des joueurs et leur permettre de choisir ce qu’ils veulent voir ou non dans le jeu.
Il y a notamment un contrôle parental, qui permet d’empêcher l’accès aux contenus créés par les utilisateurs. On a aussi un système de signalement et de modération. Si tu tombes sur quelque chose de choquant, tu peux le signaler. Si le signalement est légitime, il est transmis à notre équipe de support. Mais même avant ça, ce contenu disparaît automatiquement de ton expérience de jeu, tu ne le reverras plus jamais. L’idée, c’est que chacun se sente en sécurité, qu’on puisse signaler ce qu’on ne veut pas voir, et qu’on construise autour du jeu une communauté saine et bienveillante.
Mike Green : On passe aussi en revue les contenus créés par les joueurs. On va créer une sélection de niveaux que l’on valide nous-mêmes, en gros qu’on “tamponne” comme étant de qualité. Donc si tu veux éviter les créations toutes récentes ou moins testées, tu pourras aller explorer cette playlist. Ce seront des niveaux dont on sait qu’ils sont bons.
- À quel point le mode Création de Donjons est-il poussé en termes de logique et de design ? Est-ce que les joueurs peuvent créer des conditions, des chaînes de pièges, etc. ?
Jonny Hopper : Oui, totalement. Adam, notre level designer, arrive à créer des choses incroyablement complexes avec le système de logique du jeu. Il y a énormément de possibilités pour personnaliser l’expérience de A à Z. Tu peux faire des trucs simples comme “appuyer sur un interrupteur ouvre une porte”, mais aussi aller beaucoup plus loin, comme créer un ordinateur avec une énigme intégrée.
Par exemple, dans l’un des niveaux, il y a un mini-jeu façon “Simon Says” (ndlr : « Jacques a dit » en français) avec des blocs lumineux, c’est complètement absurde, mais ça fonctionne. L’idée, c’est qu’on a mis à disposition plusieurs couches d’outils, en fonction de la complexité que tu veux atteindre. Tu peux commencer en posant des pièces, ajouter des éléments interactifs comme des ennemis, des interrupteurs, etc. Et en dessous de tout ça, il y a le système de logique qui fait tourner l’ensemble du jeu. Tu peux relier les sorties d’un élément aux entrées d’un autre, utiliser des portes logiques, les connecter à des objectifs, des ennemis, des éléments qui se déplacent ou qui apparaissent… Il y a vraiment de quoi créer des environnements très dynamiques, avec finalement assez peu de blocs de base.
Nous remercions Jonny Hopper et Mike Green d’avoir répondu à nos questions.
King of Meat est prévu pour 2025 sur PC, PS5, Xbox Series et Switch.
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