Lost in Prayer : Notre interview de Guillaume Boucher-Vidal, fondateur et PDG du studio Nine Dots développant le roguelike montré à l’AG French Direct
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Rédigé par PikaDocMaster78/PikaDoc42
Comme chaque année depuis 2020, l’AG French Direct est l’occasion pour le public de découvrir une flopée de productions françaises et francophones indépendantes diverses et variées, à l’image de Lost in Prayer. Annoncé pour la première fois en mars 2024, ce roguelike tactique chapeauté par Nine Dots Studio (Outward) nous invitera très prochainement à arpenter le Paradis et les Enfers en quête de délivrance. Afin d’en apprendre davantage à son sujet, nous avons eu la possibilité de poser plusieurs questions à Guillaume Boucher-Vidal, fondateur et PDG de l’entreprise québécoise.

Si le trailer de gameplay du titre diffusé pendant la conférence ne vous a pas suffit, voici une interview de Guillaume Boucher-Vidal, fondateur et PDG de Nine Dots Studio. Narration, contenu, inspirations… il a très gentiment accepté de se prêter à cet exercice dans le but de nous partager pleins d’informations intéressantes sur le jeu. Bonne lecture à toutes et à tous !
Sommaire
TogglePrésentation de Nine Dots Studio
- ActuGaming : Bonjour et merci de nous accorder cette interview. Pouvez-vous vous présenter ? Qui êtes-vous et quel est votre rôle sur le jeu ?
Guillaume Boucher-Vidal : Bonjour, je m’appelle Guillaume Boucher-Vidal. Je suis le fondateur de Nine Dots Studio et PDG de l’entreprise. L’idée de base de Lost in Prayer vient de moi et j’agis également dans un rôle éditorial afin de m’assurer que le projet atteigne les attentes d’un jeu Nine Dots.
- Pourriez-vous également présenter un peu Nine Dots pour celles et ceux qui ne connaîtraient peut-être pas encore le studio ? Ont-elles beaucoup d’expérience(s) au sein de l’industrie ?
Nine Dots est un studio de Québec fondé en 2011. On ne fait que nos propres projets et notre équipe est assez mixte en termes d’expérience(s). Nous avons une forte rétention de notre équipe donc nous sommes plusieurs à y travailler depuis plus d’une décennie. Cependant, celle de Lost in Prayer a été bâtie sur mesure pour ce titre, mélangeant des gens très expérimentés et des juniors.
Un roguelike tactique riche en perspective
- Nine Dots est surtout connu du public pour son travail sur le RPG Outward commercialisé en 2019. Pourquoi avoir décidé de vous lancer dans un roguelike tactique avec Lost in Prayer ? Avez-vous fait ce choix rapidement pendant son développement ?
J’avais l’idée de Lost in Prayer à la période des débuts de l’entreprise mais je n’avais jamais eu l’occasion d’y déployer nos ressources auparavant. Un roguelike traditionnel, c’est un très grand risque commercial mais j’adore le genre et je crois qu’il est sous-apprécié. L’expérience utilisateur est très rude et abrupte dans ce genre et les visuels sont très basiques. Ce sont des jeux qui débordent de contenu, si bien qu’il est difficile de tout faire si on élève la valeur de production pour chaque créature, chaque habileté, etc. J’ai voulu rendre hommage aux roguelikes et roguelites modernes qui sont si populaires aujourd’hui. Si Outward n’avait pas été un succès financier, je n’aurais pas pu prendre ce risque.
- Comme vous venez justement de la rappeler, les roguelikes sont connus pour être des expériences mettant au défi les joueurs et les joueuses et assez répétitives sur le long terme. Est-ce que ça vous complique davantage la tâche lorsque vous cherchez à trouver le juste équilibre dans le dosage de cette courbe de difficulté ? Quelles fonctionnalités avez-vous intégré en jeu pour inciter naturellement le public à vouloir relancer une run plutôt que ragequit par excès de frustration et/ou de lassitude ?
Les concepts phares du jeu, c’est-à-dire mourir pour débloquer la créature qui nous a tués et deux chemins différents à parcourir (Enfers ou Paradis), sont spécifiquement pensés comme des solutions aux problèmes de la frustration et répétitivité inhérents au genre. Mon but est de diminuer le sentiment de frustration procuré par la défaite, sans pour autant tomber dans la méta-progression qui réduit la tension du “vrai” permadeath. Nous voulons conserver cette difficulté élevée qui récompense l’acharnement et la débrouillardise.
- Dans Lost in Prayer, vous souhaitez nous faire contrôler « une âme désincarnée partant conquérir les Enfers ou le Paradis afin d’obtenir la délivrance finale qui lui a été promise ». Qu’est-ce que cela signifie précisément ? Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce « personnage » dont nous sommes amenés à suivre le périple ?
Le joueur incarne l’âme perdue d’une personne très pieuse ayant observé les préceptes qui devaient lui ouvrir les portes du Paradis selon ses croyances mais qui se retrouve coincée au purgatoire. En explorant et défiant les cieux et les Enfers, le joueur en viendra à comprendre les manipulations qui ont mené à cette situation. Cependant, l’aspect narratif est prévu pour la version 1.0, pas pendant l’early access. Tout d’abord, nous devons bien maîtriser les mécaniques et l’équilibre du jeu avant de permettre de progresser jusqu’à la « révélation ultime ». Il faut donc bien tenir les joueurs en haleine pendant qu’on continue à fignoler tout ça.
- A ce sujet, la production promet d’intégrer un contenu solide au lancement de son accès anticipé. Toutefois, avez-vous une idée plus précise de sa durée de vie à nous partager ? Combien de temps pensez-vous rester dans cette phase ? Les 14 niveaux attendu le jour J prendront-ils place dans des maps générées de manière procédurale ou ont-elles été conçues par Nine Dots, afin que nous puissions apprendre à en connaître toutes les spécificités au fur et à mesure de nos runs ?
En fait, nous ne proposerons que 5 des 7 étages au début. Par contre, il y aura déjà beaucoup de contenu pour tenir nos joueurs occupés. Avec la démo, nous avons des personnes qui ont mis des douzaines d’heures rien que pour obtenir la moitié des créatures et explorer six étages. Je crois que day one, un joueur performant et intéressé à l’idée de tout débloquer aura de quoi facilement passer un bon 60 heures avant même notre première mise à jour.
Bien que les plans puissent évoluer, nous prévoyons de faire des mises à jour fournies et espacées dans le temps, plutôt que des plus petites et régulières. Quelque chose dans l’ordre d’un nouveau bloc de contenu tous les 3-4 mois me semble être un bon rythme à atteindre. Nous avons déjà au moins cinq mises à jour qui sont prévues d’ici la 1.0 mais cela va probablement changer selon les retours des joueurs aux différents systèmes du jeu.
Les grands roguelikes traditionnels ont tous eu des temps de conception très longs. C’est intimidant de tenter de proposer une expérience similaire à des Caves of Qud ou Tales of Maj’Eyal qui ont plus d’une décennie d’existence. Je crois que si nous voulons devenir comme l’un de ces incontournables, on doit prendre notre temps. Par contre, notre équipe est plus large que celles de ces jeux, alors nous avons une vélocité de développement qui indique qu’on n’aura pas besoin de 20 ans non plus.
- Comment arrivez-vous à conjuguer la production d’Outward 2 en parallèle de celle de Lost in Player d’ailleurs ? Le roguelike tactique est-il un projet aussi ambitieux que la suite de votre RPG ?
Nous avons embauché une nouvelle équipe pour travailler sur Lost in Prayer, avec le soutien et l’expertise de l’équipe d’Outward. Cette équipe de six développeurs reste en très grande partie autonome et ne distrait pas l’équipe d’Outward. En toute transparence, c’est effectivement un projet plus petit. Il y a une différence toutefois entre « taille de projet » et « ambitions ». Ce que nous cherchons à créer avec Lost in Prayer, c’est tout de même un défi de taille car nous visons à ce qu’il soit le roguelike traditionnel possédant la meilleure expérience utilisateur et les meilleurs graphismes en son genre, sans compromettre la richesse de son contenu ni sa complexité. On veut faire découvrir ce genre méconnu, tout en restant fidèle à son audience et à nous-mêmes.
- Pourquoi avoir décidé de nous plonger dans un univers où les créatures du Paradis et des Enfers vivent chacun de leur côté dans Lost in Player ? Quelles ont-été vos sources d’inspirations lors de la création de son lore ?
Je voulais sortir des thèmes habituels du médiéval fantasy et de la science-fiction qui regroupent la grande majorité des jeux du genre, afin d’avoir notre propre univers à offrir. Avec ce thème de la mort comme mécanique d’ouverture des possibilités, la destination ultime du Paradis et des Enfers m’est venue naturellement. Cependant, on ne voulait pas s’en tenir uniquement aux mythes bibliques. Nous avons donc pioché dans toutes sortes de concepts pour créer notre propre lore.
Mot de la fin
- Vous avez aussi lancé votre branche d’édition. Comment ça s’est passé et voyez-vous l’avenir pour Nine Dots Publishing ?
C’est libérateur et intimidant en même temps. Notre but est de créer une marque cohérente à travers nos titres, qu’ils soient faits en interne ou en externe. Nous avons ce qu’on appelle la “signature Nine Dots”, des piliers du design à suivre à travers toutes nos productions, quelque soit leur(s) genre(s) et afin que notre vision soit identifiable. Le but, à long terme, est que ceux qui apprécient les jeux qui offrent de l’expression de soi, de l’autonomie, de la complexité, du défi, de l’exploration, de la maturité et de la musique marquante trouvent toujours ce qu’ils cherchent avec nous, peu importe les titres de notre catalogue. Pour y arriver, il faut faire plus que seulement Outward. L’industrie vidéoludique a souvent déçu le public récemment et nous prendrons le temps qu’il faut pour mériter sa confiance.
- Un dernier mot pour nos lectrices et lecteurs ?
Merci de vous intéresser à des domaines plus larges que le jeu en lui-même. Notre médium est une forme d’art et comprendre les créateurs et le contexte d’une œuvre permet de porter un regard plus complet sur celle-ci et l’apprécier à un niveau différent.
Encore merci à Guillaume Boucher-Vidal et Nine Dots Studio de nous avoir accordé cette interview. Pour rappel, Lost in Prayer sortira le 15 juillet prochain, en accès anticipé, sur PC via Steam.
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