Onimusha 2 : Samurai’s Destiny – Classique un jour…
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Rédigé par Neomantis Dee
Onimusha garde avec lui le souvenir d’une licence baignant dans l’horreur d’un monde en proie aux démons. Ce qui devait être Sengoku Biohazard, des zombies durant l’ère des samouraïs et des ninjas, deviendra une licence à succès, avec sa propre identité. Pourtant, si le premier volet résumait assez bien la chose, Onimusha 2 : Samurai’s Destiny change un peu la donne. Moins sombre et oppressant, c’est pourtant l’opus de la confirmation. C’est avec ce jeu, mettant en scène un nouveau héros, que l’identité de la série s’affirme. Du hack and slash avec puzzle et énigme, le tout sous couvert d’une ambiance démoniaque, d’un semblant de base historique et d’un gameplay de qualité qui feront la renommée de la série au début des années 2000.
Remaster au sens plus feignant du terme, la mention n’apparaissant même pas officiellement dans le titre, le but de Capcom est avant tout de rendre jouable le soft sur consoles actuelles. Garder l’expérience de base intacte pour que l’on se replonge en 2002 à peu près comme si on y était. Quelques options de confort mineures s’invitent (elles sont énumérées dans notre preview dédiée) pour faire de cette mouture la plus intéressante à parcourir.

Condition de test : nous avons joué à la version PS4. L’aventure fut terminée en mode normal et nous avons lancé les minijeux pour le plaisir. Sachez qu’un bundle regroupant Onimusha : Warlords et Onimusha 2 : Samurai’s Destiny est disponible à l’achat.
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ToggleSweet Rain
Lors de notre chronique sur Onimusha, dans laquelle nous abordions la trilogie, nous avons mis en lumière le fait que la licence était un AAA d’époque. Si nous ne connaissons pas le budget mais qu’on le devine conséquent, nous savons que les tournages ressemblaient à ce qui se faisait dans un studio de cinéma. Des personnalités du cinéma hongkongais collaborèrent d’ailleurs, comme Donnie Yen et son acolyte Kenji Tanigaki qui partageront leur savoir-faire pour l’épisode 3. C’est devenu courant de nos jours, et l’on ne compte plus les acteurs modélisés dans un jeu vidéo, ou encore la mise en scène travaillée en studio, mais, au début des années 2000, ce n’était pas aussi répandu qu’aujourd’hui.
Capcom n’est pas le pionnier de la démarche, néanmoins, force est de constater que la présence de Takeshi Kaneshiro dans les épisodes 1 et 3, alliée à Jean Reno pour ce dernier, résonna en son temps. Particulièrement chez nous. Si nous avons bien affaire à des jeux vidéo, les cinématiques savaient rappeler l’influence du cinéma. Encore aujourd’hui, c’est beau, très bien animé et c’est une constante dans la série. Onimusha 2 introduit un nouveau héros en la personne de Jubei Yagyu reprenant les traits de l’acteur Yusaku Matsuda (ce dernier est décédé en 1989 et inspirera plusieurs personnages de fiction tels que Spike Spiegel de Cowboy Bebop ou bien Aokiji dans One Piece).
Malgré l’absence de l’acteur, la prestation est très convaincante. Jubei impose son charisme et n’a rien à envier à son prédécesseur Samanosuke. Il s’impose même par un regard plus dur, que l’on doit au visage de Matsuda connu pour ses rôles d’anti-héros charismatique et dont une grande partie du jeu passait par le regard. Pourtant, derrière cette dureté se cache un homme de valeur, capable de douceur, et surtout porteur d’espoir. Comme déjà dit en preview, Onimusha 2 : Samurai Destiny, c’est un opus plus lumineux, presque chaleureux (d’apparence seulement, après plusieurs heures la donne change). L’horreur semble moins présente, les lieux traversés sont plus variés et ne nous cantonnent plus à l’oppression d’un quasi-huis clos, comme c’était plus ou moins le cas dans Warlords.
L’aventure est deux fois plus longue, sans pour autant fléchir sur son rythme ni paraître inutilement rallongée. Pour Yubei, le rythme peut différer du fait de la composante sociale et des personnages secondaires importants pour le jeu. Cela étant dit, malgré leur importance, les liens (qui passent par des cadeaux à offrir, ne vous attendez pas à de la profondeur) ne sont pas obligatoire. Vous pouvez les ignorer pour progresser dans l’aventure. Une manière de retrouver le semblant de solitude qui pesait sur Samanosuke (même s’il n’était pas réellement seul dans sa quête). D’autant que, pour bien faire les choses sans guides, bon courage.
Chasing The Demon
Le challenge sera d’ailleurs plus relevé en la jouant asocial, puisqu’en fonction des affinités nouées, des personnages peuvent venir vous épauler en combat si votre vie tombe sous un certain seuil, voire carrément éclipser un boss à votre place. Ce n’est pas tout, puisque cela impacte aussi le scénario. En son cœur, pas dans sa conclusion. Des embranchements, suffisamment nombreux et implémentés de façon à ne pas être tous déverrouillés en une partie, apparaîtront seulement dans l’intrigue, avant la fin. Une approche fort intéressante. En plus d’apporter de la profondeur aux personnages secondaires auxquels on s’attache finalement, le jeu nous implique à minima dans son monde.
Avec toujours une récompense à la clé, que ce soit via les interactions sociales ou l’exploration des niveaux qui recèlent toujours un coffre ou quelque chose. Les embranchements font partie de ces récompenses en légitimant la relance d’une nouvelle partie. L’idée étant de tester une difficulté supérieure pour affiner la maîtrise du gameplay, en même temps que de s’intéresser aux autres compagnons. Il n’y a pas de superflu dans Onimusha 2 : Samurai’s Destiny, ni dans la trilogie en somme. Peut-être les minijeux, pas forcément mémorables, mais leur présence reste appréciable. Difficile de cracher sur du contenu en plus, d’autant qu’ils restent sympathiques et que ce n’est plus si courant dans l’industrie.
Cependant, à la base, sur PS2, ces bonus nous récompensaient pour avoir terminé l’aventure. Cela encourageait davantage à s’y essayer, a fortiori quand connaître le jeu et avoir suffisamment avancé est tout indiqué pour en profiter. Aujourd’hui, Onimusha 2 : Samurai’s Destiny version remaster choisit d’offrir les mini-jeux sur un plateau depuis le menu principal. Dommage de ne pas garder les conditions d’époque, car cela renforce l’idée que, depuis quelques années, nous sommes incapables de faire confiance aux joueurs et aux joueuses, en témoignent les aberrantes marques de peinture dans le remake de RE 4, pourtant absentes à l’époque.
Heureusement pour nous, les concessions de cette version 2025 se cantonnent à cela : le challenge ne bouge pas, même en mode Normal il y a du répondant. On notera seulement le mode facile disponible dès le départ ainsi que l’ajout d’une nouvelle difficulté plus corsée que les autres. Dans les faits, le titre de Capcom vieillit bien sur pas mal de points. L’esthétique déjà. La direction artistique comme les graphismes au sens technique du terme sont jolis. Le lifting très léger ressort surtout sur les personnages, plus nets. Les environnements semblent peu touchés, bien qu’ils gagnent en netteté également. Et puis cette ambiance qui nous submerge sans jamais nous lâcher, les musiques participent aussi très bien au rendu en étant dans le ton, allant jusqu’à rappeler des compositions habituellement destinées au cinéma.
Heroes Among Heroes
Si l’on peut cependant reprocher des choses, que l’on acceptait peut-être plus aisément en 2002, les soucis de la caméra fixe et l’ajout des raccourcis pour changer d’armes qui, bien que pertinent, est discutable en pratique. Outre l’impossibilité d’aller dans deux sens pour changer d’armes, puisque l’on n’utilise qu’une seule gâchette pour gérer épée et arc (on repassera pour l’ergonomie), le souci majeur, c’est la lenteur de l’animation. L’évidence saute aux yeux : ce n’était pas pensé dans le jeu de base. Rien d’horrible, cela reste toujours mieux que d’ouvrir systématiquement l’inventaire, mais on le fera quand même à l’occasion.
Parce que, quand les combats se corsent, lors des épreuves qui inspireront le Bloody Palace de la franchise DMC, par exemple, changer rapidement d’armes en temps réel pourra vous coûter cher. Dans les salles mêlant archers et ennemis attaquant au corps à corps aussi. Continuons sur les écueils du soft, qui n’en étaient pas tant en 2002. Malgré la qualité évidente des cinématiques, certaines, généralement celles rendues via le moteur du jeu, accusent des transitions abruptes lorsqu’il s’agit de revenir à la partie gameplay. L’écriture de plusieurs dialogues, même de personnages, pourra aussi faire tiquer. Ce n’est pas tant le parti pris Série B que les dialogues et la narration. Rappelons-nous qu’en tant que remaster désireux de pérenniser une expérience vieille de plus de 20 ans, il faut prendre sur soi et se remettre dans le contexte.
Ce n’est pas une force de la licence qui, à l’instar de son modèle Resident Evil, embrasse fièrement la série B. Les inspirations historiques ne sont qu’un décor pour un univers à la croisée des genres (genre cinématographique). Nous l’avons précisé plus haut, c’est surtout le travail d’ambiance qui saisit. Onimusha 2 : Samurai’s Destiny, à l’instar de son aîné, nous plonge la tête sous l’eau pour ne la ressortir qu’après une dizaine d’heures, lorsque l’on découvre l’ampleur de cette histoire que l’on prend toujours plaisir à suivre. Le problème, outre ceux susmentionnés et inhérents aux débuts des années 2000, c’est la partie combat. C’était très bien en son temps, mais, comme relevé dans la preview, aujourd’hui ce n’est plus pareil.
Onimusha 2 : Samurai’s Destiny s’en sort au moins avec les honneurs. Les équipes de Capcom à l’œuvre sur la licence, par ailleurs pensée comme une trilogie, maîtrisent leur sujet. Le talent des équipes permit de bâtir un game design solide, sans cesse amélioré d’un épisode à l’autre et qui tient encore fièrement. Évidemment, ce n’est plus aussi impactant de nos jours, pourtant la licence reste unique. Et puis, n’oublions pas son influence sur le médium. Malgré une approche que l’on rapproche plus du hack’n’slash que du beat’em all, la licence a imposé des codes encore en vigueur dans le beat’em all 3D (DMC consolida parallèlement l’influence avec, dans son cas, une influence manifeste côté gameplay).
À ce titre, il sera intéressant de voir l’évolution envisagée avec le nouvel épisode acté pour 2026. Si nous voyons clairement l’influence de la trilogie de Capcom sur les Souls-like et sans doute d’autres jeux mettant en scène des samouraïs en 3D, nous avons hâte de voir comment le studio parviendra à moderniser la formule sans trahir l’essence d’Onimusha. Parce que la trilogie inaugurée sur PS2 a su évoluer sans jamais se renier. En opérant de légers mais utiles et significatifs ajustements, en capitalisant sur les forces des jeux. Tout l’inverse de la saga RE. Et quand il fut décidé de ressusciter la licence en 2006 avec un nouvel opus prenant une autre direction, Onimusha : Dawn of Dreams, les liens narratifs, les vrais acteurs et même le numéro furent retirés. Il fallait signaler un revirement notable capable de déconcerter les fans de la première heure.
Onimusha 2 : Samurai’s Destiny, c’est le témoignage d’une époque où l’on faisait du jeu vidéo aussi pour le plaisir du jeu, pas que pour l’argent. Parce que c’est généreux, c’est ni trop court ni trop long pour ce que ça veut nous proposer. Le rythme est parfaitement maîtrisé et l’expérience sait se renouveler avec ses mini-jeux, ses embranchements scénaristiques, plusieurs personnages jouables sans se reposer essentiellement sur l’action. Ce n’est pas anodin si la licence hante toujours l’esprit de ceux l’ayant connue sur PS2. Parce qu’avec le million de ventes facilement écoulé, la trilogie demeure un des meilleurs succès de Capcom à l’époque, de la console de Sony également. Jeu de PS2 oblige, il paraît difficile d’espérer reprendre une claque en 2025, quoique, mais nous avons là un soft majeur, qui résiste au temps et transpire une époque inspirée qui semblait faire plus de bien que de mal aux licences et au médium. En attendant le grand retour, cette expérience extirpée des profondeurs du passé vaut le détour.