In extremis. Voilà comment on pourrait qualifier le projet d’Alex Hutchinson après le limogeage de Typhoon Studios par Stadia suite à l’échec de son modèle économique, précipitant les récemment acquis créateurs de Journey to the Savage Planet au placard. Après des mois de négociations, l’homme et son équipe ont alors récupéré les droits de la propriété intellectuelle de l’épopée loufoque et ont pu fonder un nouveau studio, Raccoon Logic, nous permettant de profiter d’une nouvelle aventure qui aurait pu ne jamais voir le jour et que vous avions déjà eu l’occasion d’approcher, Revenge of the Savage Planet. Développé par une core team d’une trentaine de personnes sous Unreal Engine 4, le jeu sort ce 8 mai sur PC, PlayStation 4, PlayStation 5 et Xbox Series X/S et dès son lancement dans le Xbox Game Pass, sans annonce faite à ce jour pour une sortie sur Nintendo Switch 2. Les détendeurs d’une édition Premium pourront y jouer dès ce 5 mai incluant d’autres bonus. Que vaut cette nouvelle aventure dans cet univers loufoque ?
Conditions de test : Nous avons joué à Revenge of the Savage Planet sur PlayStation 5 Pro durant un peu plus de 17h, en mode solo et en coopération locale.
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ToggleIl s’passe des choses bizarres
Si vous n’avez pas pu jouer à Journey to the Savage Planet, rassurez-vous, cette suite reprend grossièrement la trame du premier épisode et vous plonge dans une nouvelle aventure sur de nouvelles planètes près d’un siècle après les événements du jeu précédent. Pratique pour inclure les nouveaux joueurs et nouvelles joueuses dans une suite qui se veut plus ambitieux côté mise en scène mais qui troque surtout la vue à la première personne contre une plus objective bien plus efficace il faut l’admettre.
On s’en rend d’ailleurs compte dès les premières minutes avec l’ajout d’animations totalement loufoques, notamment sur la marche, la course ou encore les atterrissages depuis des hauteurs par exemple. On pensait de prime abord que cela allait nous lasser mais preuve en est que non : c’est très bien trouvé. Tout comme l’humour omniprésent qui fait son retour ici : loufoque, cocasse, pas très élevé intellectuellement mais qui fait bougrement du bien. Comme dans le précédent opus, rien n’est pris au sérieux dans Revenge of the Savage Planet, à commencer par l’histoire, un poil décevante il faut l’admettre.
La faute à un manque d’engagement profond demandé aux joueurs et joueuses, à cause d’une narration édulcorée sur quatre planètes (voire cinq si l’on inclut la planète bonus dédiée à un ennemi mystérieux), contre une seule et organique planète dans le jeu précédent. Le but est cependant le même : trouver les pièces pour réparer son Javelin, le vaisseau spatial censé nous ramener sur Terre. Comptez 9 à 11h pour terminer l’aventure principale et près du double pour tout cleaner à 100%.
Mais c’était sans compter sur les missions données par votre boîte, Alta Interglobal, qui a racheté Kindred Aerospace suite aux échecs dépeints dans le jeu précédent. La multinationale décide elle aussi de vous virer et vous laisse à votre triste sort. Heureusement, tous les équipements dédiés à votre mission de reconnaissance spatiale vous sont laissés et c’est ainsi que débute votre périple sous fond de rivalité entre les deux entreprises, l’égocentrisme et la grosse tête (au sens littéral) du PDG de la première (Gunther Harrison) et le retour du PDG un peu chelou de la seconde, Martin Tweed.
Au fil de l’aventure, vous suivrez des ordres et contre-ordres de ces deux têtes pensantes, vous demandant d’enquêter sur l’un ou les agissements de l’autre et découvrirez une fois de plus, comme dans le premier jeu, les méfaits de la mondialisation. Un propos toutefois nettement plus mesuré cette fois, plus sage et un peu moins politique malheureusement, alors qu’il aurait été tout trouvé d’en profiter pour régler ses comptes comme une sorte de vengeance en rapport avec la propre histoire du studio.
À noter par ailleurs que l’on pourra retrouver deux fins distinctes, une fin cachée dirons-nous et une vraie fin, plus classique. Nous ne vous en dirons pas plus pour ne rien gâcher mais il nous faudra noter que cette fin cachée intervient après un combat assez saisissant et difficile (le seul pic de difficulté du jeu) qui vient contrebalancer le manque cruel de boss qui se comptent pas tout à fait sur les doigts d’une main.
Un système solaire qui brille ?
Nous l’avons dit, vous aurez à loisir d’arpenter quatre planètes bien distinctes et à l’atmosphère différentes pour chacune d’entre elles : Stellaris Prime, la planète de départ, est une sortie de forêt luxuriante très jolie et bien garnie aux multiples secrets; vous retrouverez aussi Xephyr et son désert suffoquant ou encore Faille Zenithienne et ses calottes glaciaires aux grottes de roche fondue. La dernière planète Quasadron IX est sûrement l’une des plus étonnantes avec des biomes allant de la savane à la vallée de champignons hypnotoxiques ou sa décharge à ciel ouvert.
Les couleurs sont chatoyantes, les graphismes ont fait un bond en avant depuis le précédent opus et la direction artistique façon cartoon est toujours aussi décalée que dans le premier jeu. Créatures aux designs douteux, sensations de gigantisme de ces environnements hostiles, réactions toujours aussi extravagantes et étonnantes, on prend plaisir à retourner dans ce monde complètement allumé et dans des environnements proposant au final beaucoup de diversité malgré un ensemble pas aussi ouvert que l’on aurait souhaité, bien que ces environnements se suffisent à eux-mêmes pour ne pas saturer le jeu d’objectifs inutiles.
Comptez plus d’une centaine de blobs oranges qui sont de retour pour améliorer votre santé et votre endurance, mais aussi des bobines pour améliorer vos équipements à l’imprimante 3D, ou encore des cosmétiques pour personnaliser votre tenue. Probablement l’ajout qui nous aura le moins plu ici puisqu’il nous faudra trouver plus d’une trentaine de ces vêtements pour reconstituer des tenues à quatre pièces dont certaines très étonnantes (Dave the Diver pour ne rien vous dire…).
Le contenu annexe n’est pas en reste puisqu’en plus de nombreux secrets et clins d’œil, vous allez devoir scanner et capturer les 36 créatures présentes sur les planètes (grâce à l’exploitation de leurs points faibles) et lancer des recherches pour débloquer des améliorations ou tenues supplémentaires et ce ne sera pas une mince affaire. Le Kindex fait donc son retour et vous demandera de scanner des centaines d’éléments dans votre environnement. Heureusement, Revenge of the Savage Planet incorpore désormais une carte complète des zones traversées et un codex très complet pour chaque région d’une planète histoire de ne rien manquer. Le bouton R3 (sur PlayStation vous permettra par ailleurs de scanner l’environnement proche pour débusquer de nouvelles opportunités).
L’occasion de confirmer ici que le jeu vous prend constamment par la main, que ce soit sur les objectifs suivis ou sur les collectibles, que vous pourrez suivre sur une boussole en haut de l’écran ou sur les éléments que nous venons d’évoquer. Un peu dommage par ailleurs que le jeu ne propose pas d’épurer ou rendre plus difficile l’exploration mais il faut remettre dans le contexte que l’on parle d’une équipe assez ramassée dont le noyau ne contient qu’une trentaine de développeurs et développeurs.
A noter la présence d’une édition Deluxe avec des quêtes narratives bonus (Ding Dong Influencer Accelerator Program Extreme Routine) ainsi que des cosmétiques, et pour une fois, les équipes n’y sont pas allées de main mortes puisqu’elles vous apportent de vrais contenus en jeu à commencer par ces spots à égoportraits disséminés dans le monde, ou encore ces expériences à réaliser au détriment de… vous-même, quand il ne s’agit pas personnaliser votre base et de la faire noter par un personnage étonnant, Shama Lama.
Car oui, Revenge of the Savage Planet ajoute la possibilité de personnaliser votre base avec l’ajout de nombreux accessoires, pièces, décorations. Si vous aimez ça, tant mieux, mais il faut avouer que ce n’est pas le cœur de l’expérience et que seules les animations propres à chaque équipement et qui nous ont fait sourire nous ont convaincu de s’y investir un peu plus que prévu.
Une progression inégale
On regrettera cependant un but global mystérieux, comme l’était la tour dans l’opus précédent, renfermant un mystère à élucider en passant par divers biomes et en incorporant davantage la structure du metroidvania pour progresser. Cet aspect est ici aussi bien présent avec l’ajout d’un saut chargé, d’un fouet ou encore de nouvelles capacités pour votre Eko, le drone qui vous suit partout (et qui est toujours aussi loufoque avec son accent québécois à couper au hachoir – seule version française intégrale disponible), mais on le ressent nettement moins que dans le jeu précédent.
Prenons l’exemple des améliorations des armes notamment. Vous démarrez l’aventure avec votre pistolet à plasma mais vous pourrez l’améliorer à condition de réaliser des tâches précises dans le monde et lui permettre de lancer de la lave, du blob vert, une matière visqueuse conductrice d’électricité etc. L’occasion d’essayer tout cela sur le terrain pour affiner vos techniques d’approche. Si vous ne le faites pas, vous n’obtiendrez par exemple pas le triple-saut, ou la super-esquive, ou encore pour revenir aux armes, de tir chargé ou de tir rebondissant. Idem pour la chaleur émanant de votre pistolet et vous forçant à faire une pause si vous n’installez pas de stabilisateur.
Autant de choses qui étaient obligatoires pour progresser dans le premier opus mais qui ne se sont avérées finalement pas si utiles que cela, nous permettant de terminer l’aventure sans accéder à la plupart de ces améliorations. Nous les avons acquises dans le post-game pour réaliser le reste des quêtes annexes et le reste de l’exploration mais il parait dommage de ne pas avoir plus donné de challenge à une aventure au final trop facile et à la structure un peu trop lisse. On notera cependant l’ajout appréciable de séquences dans la peau de Eko (même si trop courtes et trop peu présentes) ainsi que la possibilité d’explorer les fonds marins, absolument magnifiques.
Heureusement pour tous les types de joueurs et joueuses, le gameplay est très facilement pris en main et permet une réelle progression dans les approches. Vous observez votre environnement, découvrez une manière de progresser en fabriquant une amélioration, puis avancez en éliminant des ennemis et récoltant des objets égarés. Certains combats nécessiteront une certaine observation des patterns des ennemis sans toutefois vous proposer un mur infranchissable en termes de difficulté, à aucun moment d’ailleurs.
D’autant plus que le jeu ne dispose pas de niveaux de difficulté pour rendre l’ensemble plus difficile ou plus digeste, et c’est même pire, puisqu’au fil de vos améliorations, vous disposerez de l’annulation des dégâts de chute, d’une paravoile pour adoucir vos chutes ou encore d’un fouet capable de se fixer n’importe où dans le ciel et non plus sur des accroches spécifiques, ouvrant la voie à toutes sortes de possibilités grisantes sur le papier – l’exploration plus verticale en ressortant d’autant plus libre – mais plus dommageable sur la structure de la progression, somme toute inégale.
Côté bande-son, il faut avouer que le thème choisi fonctionne à merveille avec l’univers. On regrettera cependant qu’il soit si souvent utilisé (ou que d’autres ne lui emboîtent pas le pas), ne serait-ce que par bribes lors du lancement de combats, mais ce n’est qu’un détail. Les bruitages font encore une fois un excellent travail, que ce soit lors du tir ennemi, ou de marcher sur des substances non identifiées, mais le plus gros du travail revient aux doubleurs, qui ajoutent une fois de plus la touche loufoque à l’univers de par un accent et des blagues très prononcées.
Sur le plan technique, nous avons éprouvé un seul crash durant toute notre épopée lors d’une raclée pas permise par un boss en fin de jeu. Le reste de notre aventure s’est avérée sans encombre et proposait même des temps de chargement très rapides y compris entre les planètes, le tout en 4K 60 fps avec quelques vibrations haptiques. Pas de bugs, hormis d’affichage liés à des défauts encore non corrigés mais cela reste mineur avant le patch day one de la sortie. Nous avons pu tester aussi la progression en coopération locale, et il est vrai que cela apportait un gros boost de plaisir non négligeable à vivre, mais ceci est facultatif, l’aventure se vivant très bien tout seul. A noter qu’une coopération en ligne est possible mais uniquement sur le même écosystème, pas de cross progression ou de crossplay possible.
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