C’est fou comme le jeu vidéo aime à nous surprendre. Alors qu’on pensait que, enfin, le genre Roguelike ne pouvait plus innover, voilà qu’on nous sortait, l’année passée, le génial Balatro qui réinventait la formule en la combinant avec le Poker et ses subtilités. Un coup de maître qui n’aura pas tardé à faire des émules, comme Hades quelques années plus tôt, et qui aura relancé pour un temps la popularité de ce genre désormais décliné à toutes les sauces. Enfin, vraiment toutes les sauces ? Il faut croire que tout n’avait pas encore été fait, non, puisque cette semaine c’est au tour du casse-briques de se voir repensé, avec un certain Kill the Brickman sorti sans prévenir.
À l’heure de son annonce, cela faisait déjà une petite semaine que nous avions les mains dessus, le développeur nous ayant fait parvenir une copie pour parler de son « shadowdrop » comme disent les anglophiles. Toutefois, alors que nous n’avions pas prévu de passer beaucoup de temps dessus initialement, dans l’idée de seulement couvrir sa sortie en partageant avec notre communauté cette étrangeté, nous nous sommes finalement laissés prendre dans les filets de Kill the Brickman pendant pas loin de quinze longues heures. Ce qui nous a permis de faire le tour de sa proposition atypique, que nous avions, de fait, bien envie de critiquer dans ces colonnes.
Conditions de test : Nous avons passé pas loin de quinze heures sur la version Steam de Kill the Brickman, ce qui nous a permis de faire un tour quasi-exhaustif du propriétaire, débloquer pratiquement tous les succès, et améliorer une bonne partie de ce qui pouvait l’être.
Arkanoïde au pays des temps morts
Alors bien sûr, si vous êtes un adepte du genre, vous savez qu’il ne suffit pas de parler de Roguelike ou de Roguelite pour décrire Kill the Brickman. Ce terme est en vérité utilisé pour définir un choix de game design relevant de l’aléatoire (et souvent de la mort en boucle), et s’applique donc désormais à une quantité assez folle d’expériences aussi diverses que variées. Du Tactical-RPG avec Wargroove 2 ou Metal Slug Tactics, du Hack’n Slash avec Hades ou [REDACTED], du Deck Builder avec Slay the Spire ou Zet Zillion, et même du jeu d’horreur textuel avec World of Horror… Bref, il y en a pour tous les goûts, au point que si l’on vous parle simplement de Roguelike, vous n’avez pas la moindre idée de ce à quoi vous attendre en matière de gameplay.
Précisons le donc dès maintenant, Kill the Brickman est un jeu de casse-briques… au tour par tour. Oui, vous avez bien lu. Non, cette recette ne coule pas de source, on vous l’accorde, et on avait nous-mêmes beaucoup de mal à nous figurer à quoi pouvait bien ressembler le jeu avant de poser nos mains dessus. Pourtant, ça paraît assez fou que personne n’y ait pensé avant cela tant le mélange fonctionne bien. Les amateurs de casse-briques à l’ancienne seront toutefois tellement chamboulés qu’il pourraient bien ne pas s’y retrouver dans cette expérience étrange. Puisque les réflexes et la rapidité laissent la place à la réflexion et aux prises de décision. Cela dit, puisqu’il est vendu moins de cinq euros… on serait plutôt enclin à vous enjoindre de l’essayer quand même, dans le doute.
Dans Kill the Brickman, vous ne contrôlez pas une petite planche en bas de l’écran, et ne pouvez pas renvoyer les projectiles que vous aurez au préalable lancés vous-mêmes. Non, ce que vous dirigez c’est la visée d’un pistolet, qui va vous permettre de tirer une munition que vous aurez choisie, visualisant le commencement de ses ricochets sur le terrain. Un concept qui rappellera des souvenirs aux joueurs qui ont touché à des titres comme Steamworld Heist (on vous recommande d’ailleurs chaudement le second volet dont voici le test) ou Puzzle Bobble. Pour venir à bout des niveaux, il va vous falloir avant tout maîtriser l’art du calcul de trajectoire, même si une bonne dose d’aléatoire demeure à prendre en compte, et que le nombre de ricochets devenant assez ahurissant ne permet pas de tout anticiper.
Parce que vous ne tirez plus seulement sur des briques, mais sur des personnages en forme de carrés, aux designs extrêmement réussis d’ailleurs, attendez-vous à ce que ceux-ci répliquent. Ce qu’il feront en deux temps : d’abord ils possèdent certaines capacités, qui vont de la destruction temporaire de morceaux du décor à la création de nouveaux cubes sur le terrain, en passant par l’attribution d’auras à leurs alliés ; ensuite, ils pourront parfois vous prendre pour cible, en vous tirant dessus, ce qui aura pour conséquence de vous faire perdre un précieux point de vie. L’occasion parfaite pour aborder le challenge du titre, qui nous a semblé beaucoup plus doux que chez nombre de ses congénères.
Puisqu’il ne nous a pas fallu plus d’un gros après-midi pour voir le bout de ses quatre modes de jeu, qu’on pourrait grossièrement relier à des modes de difficulté, on peut dire que Kill the Brickman n’est pas ce qui se fait de plus punitif dans son genre à date. Certes, nous avons essuyé quelques morts, et certains niveaux nous ont poussé à nous creuser les méninges plus que de raison, mais dans l’ensemble on ne s’est jamais senti très éloigné de la victoire finale. Le titre demeure plutôt généreux, et il distille assez bien ses ressources, ce qui mène le joueur sachant prendre son temps à des parties assez longues mais aux défis plutôt équilibrés. En moyenne, nous avons passé une grosse quarantaine de minutes sur chacune de nos runs menant au boss final.
Moon 44
Bien sûr, Kill the Brickman a ses petites subtilités, autres que son aspect visuel rudimentaire dont ne ressortent vraiment que les munitions et les briques animées. Pour commencer, là où dans Balatro vous achetiez des jokers, de nouvelles cartes ou des cartes de tarot, ici vous mettez la main sur de nouveaux types de chargeurs, des munitions spécifiques, ou des bonus. Le tout via un menu qui n’est pas sans rappeler celui du jeu précédemment cité, d’ailleurs. Au même titre que les objectifs annexes à choisir au début de chaque niveau (chaque mode en enchaînant exactement dix), au point qu’on en soit venu à se demander si Kill the Brickman n’était pas à voir, en réalité, comme le Balatro des casse-briques. Notre titre putaclic étant tout trouvé (pardon !).
Chaque chargeur aura sa particularité : le chargeur corrosif augmentera les effets des balles corrosives que vous tirerez avec, et le chargeur explosif fonctionnera sur le même principe, quand le chargeur Oneshot ne vous permettra de tirer qu’une munition mais lui octroiera une bonne quantité de rebonds et dégâts supplémentaires. Tout cela peut évidemment être amélioré, ce sans quoi il est assez difficile de voir le bout des runs évidemment. On recommande d’ailleurs d’acheter un maximum de chargeurs le plus tôt possible (cinq pouvant être cumulés), parce qu’ils s’insèrent en bas de l’écran pendant les phases de casse-briques, empêchant vos balles de tomber dans le vide. Un petit truc qui surprend en premier lieu, mais se révèle plutôt agréable à découvrir.
Côté munitions, il y a là aussi pas mal de choses à prendre en compte. De base, nous avons trois types de balles, correspondant à trois couleurs distinctes : rouges = explosives, vertes = corrosives, bleues = balles se clonant au contact des briques humaines. Mais il sera rapidement possible d’acheter de nouvelles balles, certaines augmentant leur nombre de rebonds ou leurs facultés, d’autres vous conférant un bonus permanent chaque fois que vous les échangerez en début de tour (ce qui fonctionne là aussi comme chez Balatro d’ailleurs), quand d’autres encore permettront d’étourdir les briques au contact afin de les empêcher de vous tirer dessus. Ajoutez à cela les différents bonus cités plus tôt, et vous obtenez une recette assez bien huilée, à laquelle on devient vite accro.
Dommage que de gros écueils subsistent. Nous avons joué au titre dans une version non terminée, et pas mal de descriptions manquaient sur les bonus à acquérir, ce qui s’est révélé plutôt handicapant. On espère que la version 1.0 du titre aura corrigé ce défaut. Mais on doute qu’elle s’attaque en profondeur à la traduction française qui mériterait un coup de chiffon elle-aussi. On n’aurait pas été contre plus de contenu aussi, avec peut-être une plus grande quantité de boss, et un challenge adaptable pour corser un peu plus les choses. En l’état, si nous avons passé un excellent moment sur le titre, étant donné que nous avons pratiquement tout vu (même si nous n’avons pas amélioré les trois flingues disponibles au max, cela prend beaucoup de temps), nous sommes prêts à passer à autre chose. Enfin, difficile de ne pas mentionner la musique, dont l’unique morceau tourne en rond. Dommage, parce qu’à côté de ça les bruitages sont vraiment sympas.
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