Impossible d’être passé à côté de la tempête No Man’s Sky de l’été dernier, ce jeu qui laissait espérer tellement, pour ensuite retomber comme un monumental soufflé. Depuis, nous avons appris à nous méfier un peu plus des bandes-annonces qui nous vendent du rêve, mais aussi des expériences qui proposent un terrain de jeu généré de manière procédurale, confiant au jeu une durée de vie presque infinie. C’est dans ce contexte qu’intervient Morphite, le dernier-né de Crescent Moon Games, et qui rappellera forcément au premier coup d’œil le tant décrié No Man’s Sky. Nous allons voir ensemble si la ressemblance s’arrête au concept, ou si lui aussi n’est pas à la hauteur de ses ambitions.
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ToggleLara Croft des étoiles
Pour ceux qui n’auraient aucune connaissance de ce genre, il s’agit tout simplement de voyager à travers l’espace, de planète en planète, générées de manière – presque – aléatoire, pour arriver à l’objectif souhaité. En chemin, vous ferez la connaissance de créatures elles aussi fabriquées de façon procédurale, et votre but sera de récupérer des matériaux et de scanner l’environnement de chaque parcelle de vie afin de pouvoir upgrader votre armure, vos armes et votre vaisseau. Ceci étant dit, je suis persuadé que la ressemblance avec le jeu d’Hello Games vous a déjà frappé, mais Morphite à l’avantage de proposer ce qu’il manquait terriblement à No Man’s Sky, une véritable narration.
Vous incarnez Myrah Kale, une sorte d’aventurière spatiale effectuant diverses courses pour Mr. Mason, celui qui a pris soin de Myrah durant toute sa vie. Pendant une simple mission de collecte de ressources, notre héroïne va tomber nez à nez avec la substance la plus rare de l’univers, ayant des pouvoirs illimités, le Morphite. Intriguée par cette énergie qu’elle croyait être une légende, Myrah va se lancer à la recherche d’autres fragments de Morphite, jusqu’à se rendre compte que l’univers entier est en danger, et que le Morphite ne lui est peut-être pas si étranger que ça…
L’histoire de Morphite reste terriblement classique et prévisible, mais l’idée d’apporter un peu de narration à travers ce voyage spatial apporte un fil rouge appréciable.
Somme toute, le pitch en lui-même est assez sympathique et on appréciera l’effort d’avoir construit un scénario dans un jeu tel que celui-là. Sans non plus être passionnant, il parvient à donner une raison suffisante de continuer son voyage et de voguer à travers les étoiles. Il ne faudra pas attendre trop de développement, mais le personnage de Myrah et surtout de son compagnon chat-robot, Kitcat, apportent un petit supplément d’âme renforcé par l’humour de ce dernier. En plus de cela, de nombreuses quêtes annexes sont disponibles, certes souvent absurdes, mais qui peuvent nous arracher un sourire et rompre la monotonie du jeu. On regrette aussi que la mise en scène soit aussi simpliste et qu’on puisse deviner ce qui va se passer bien avant que le jeu nous le raconte, mais pour un jeu à si petit budget, on lui pardonnera cette imperfection.
Des promesses perdues dans le vide intersidéral
Ce qu’on lui pardonne moins en revanche, c’est sa maniabilité, complètement aux fraises la plupart du temps. Morphite possède en lui plusieurs influences telles que Ratchet & Clank ou encore Metroid, et tire son gameplay de ces derniers. Malheureusement, tout ce qu’il nous propose est au mieux approximatif. Les phases de shoot sont tout bonnement inintéressantes et peu précises, malgré la possibilité de pouvoir améliorer la précision de nos armes. Ce qui serait finalement inutile, puisque le jeu propose un lock très permissif, qui aidera à venir à bout de n’importe quelle bestiole. A moins d’en faire l’impasse et de se rajouter une difficulté artificielle, Morphite ne brille clairement pas du côté de l’action. On retiendra peut-être des phases de boss légèrement plus intéressantes, mais le plaisir de jeu n’y est toujours pas. Surtout lorsque nos mouvements sont entravés par les quelques bugs et que le jeu plante, ou encore quand on peste sur des problèmes de textures ou des murs invisibles sortis de nulle part. Le constat que l’on peut tirer sur l’optimisation du titre sur console n’est donc pas fameux.
L’autre gros morceau de gameplay réside dans le côté plateforme et énigme du soft. Sur le papier, l’intention est bonne, d’autant plus que le jeu intègre à ses puzzles de nombreux outils différents. Cependant, l’exécution de ces phases, très peu nombreuses, donnent souvent l’occasion de s’arracher les cheveux tant les solutions peuvent paraître obscures. Il en est de même pour l’aspect plateforme, puisque l’imprécision des sauts et des textures est clairement handicapante pour la progression.
C’est une affaire de goût et d’habitude, mais le champ visuel (FOV pour les connaisseurs) est terriblement réduit, donnant l’impression que votre personnage ne mesure qu’un petit mètre. Cela engendre beaucoup d’imprécisions dans les sauts, puisqu’il est très difficile de voir jusqu’où notre élan va nous porter. Le constat est donc bien faible pour un jeu qui se revendique d’autant d‘influences, ce qui est regrettable car il propose plusieurs bonnes idées. A partir d’un certain stade du jeu, vous aurez accès à un grappin et à un outil vous permettant de créer des plateformes provisoires, ce qui est assez sympathique au premier abord. Mais c’est sans compter sur la maladresse du jeu et son level-design tout sauf intuitif qui finira par mettre au placard toute lueur d’espoir. Ces phases ne sont pas véritablement affreuses, seulement extrêmement rébarbatives, sans plaisir aucun.
A cause d’une maniabilité très approximative, les phases de plateformes ne fonctionnent jamais réellement.
Tout ceci concerne donc l’exploration au sein des planètes, mais qu’en est-il vraiment de la partie spatiale du soft ? Eh bien là encore, il y a de quoi être déçu. Avant toute chose, il faut bien comprendre que Morphite est un jeu à budget très réduit, et qu’il était avant tout destiné aux plateformes mobiles, et que par conséquent, les phases spatiales vont être à des années lumières que ce qu’un No Man’s Sky peut proposer. Ceci étant dit, et sans faire la fine bouche, il est difficile d’être pleinement satisfait par ce que l’on a en face de nous. Tout d’abord, oubliez tout de suite la possibilité de contrôler votre vaisseau. A travers des déplacements automatiques via une carte infinie, vous serez amenés à choisir le système solaire souhaité, puis la planète désirée. Pas d’exploration spatiale en vue, mais cela peut se comprendre.
Lors de vos voyages, vous serez parfois interrompus par des événements aléatoires, donnant lieu à diverses situations. Si elles se répètent très vite, on loue tout de même l’effort d’avoir voulu casser la routine des voyages. La plupart du temps, ces situations vous proposent un choix, qui pourra vous être favorable ou pénalisant. Par exemple, si un cargo perd une partie de sa marchandise en route, il vous sera proposé de récupérer la cargaison ou non. Avec de la chance, vous remportez le butin, mais dans le cas contraire, le cargo vous attaquera et votre vaisseau en pâtira. On retrouve aussi des confrontations avec des bandits de l’espace, qui donnent lieu à des escarmouches minimalistes, dans lesquelles vous ne pourrez déplacer que votre viseur alors que votre vaisseau fait du surplace. Autant vous dire qu’on est loin, très loin, de quelque chose d’épique ou d’intéressant.
Géométrie spatiale
Etrangement, la plus grande qualité de Morphite réside dans sa qualité visuelle. En dépit de toute notion technique, le jeu s’en sort avec les honneurs en proposant une direction artistique minimaliste mais qui fonctionne malgré tout assez bien. Le style polygonal permet de créer une identité picturale forte qui reste agréable à l’œil, du moins lorsque l’éclairage ne fait pas défaut. Car ce choix artistique – et sûrement économique – ne fait pas des merveilles sous l’eau. En effet, votre champ de vision qui était déjà réduit vient s’assombrir, et il devient difficile de se repérer, surtout lorsque l’on est entouré de surfaces monochromes. Malgré ce détail, le soft fait le job et s’en sort plutôt bien pour un jeu de ce calibre, même si le style ne conviendra pas à tous.
Là où il tire le plus son épingle du jeu, c’est dans les planètes conçues à la main, à l’inverse de celles façonnées par ordinateur. Si ces dernières n’ont presque aucun intérêt tant elles finissent toutes par se ressembler, les planètes que l’on peut visiter durant les missions principales parviennent à se démarquer et à offrir une ambiance qui apparaît comme un bol d’air frais au sein du jeu. Finalement, lorsque l’on voit cela, on se demande pourquoi le jeu ne fait pas plus d’efforts pour créer un univers plus réduit et plus travaillé, plutôt que de s’efforcer à construire une galaxie bien trop ambitieuse, qui finit par se révéler vraiment décevante. D’autant plus que certaines missions au cœur de ces planètes s’avèrent être sympathiques, comme la course d’engins volants qui rappellera forcément des souvenirs aux amoureux de Star Wars.
Le contraste entre les planètes façonnées à la main et celles gérées de façon procédurale est assez marquant, tant ces dernières paraissent complètement vides et sans intérêt.
En dehors de son style visuel, Morphite s’en sort aussi plutôt bien avec sa bande-son, qui parvient à créer plusieurs genres d’atmosphères. Certains thèmes ressortent par le fait qu’ils arrivent à rendre une ambiance angoissante, qui nous ferait presque imaginer que la planète qui nous entoure est remplie de sombres secrets, alors que l’on sait bien que c’est loin d’être le cas. Rien de très marquant en soi, mais dans un jeu de la sorte, l’univers sonore est une partie à ne pas négliger. Morphite s’en sort avec les honneurs, mais un petit bémol subsiste néanmoins : la gestion des pistes.
Pour être clair, lorsque vous vadrouillez à travers une planète, la bande-son du jeu passe presque en mode playlist, et ne s’adapte en aucun cas à vos actions. Pas de montée en puissance lorsqu’une bête vous attaque, pas d’élan mystique lorsque vous découvrez une grotte, rien. Cela évite certes de rentrer dans une monotonie auditive, mais cela reste très perturbant lorsque que la musique s’accélère alors que vous ne faites que scanner un petit bout de plante. Enfin, un mot sur le casting vocal qui est lui aussi relativement satisfaisant, même s’il faut vous prévenir, le jeu est entièrement doublé en anglais et ne propose aucun sous-titre français. On reste sur de l’anglais de base, mais il est important de le préciser.
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