L’histoire du personnage de Big Boss et, par la même occasion, celle de Metal Gear Solid, s’est clôturée avec le diptyque Ground Zeroes/Phantom Pain. Une conclusion rédigée dans des conditions chaotiques et acte d’un divorce entre Hideo Kojima et Konami. Depuis, l’un des hommes les plus célèbres de l’industrie a suivi le chemin que l’on connait avec Kojima Productions et la licence Death Stranding, tandis que Konami a longtemps laissé la marque Metal Gear au placard.
Ce n’est qu’en 2023 qu’elle refait surface. Avec la sortie de Metal Gear Solid: Master Collection Vol.1, compilation retraçant l’histoire majeure de la saga jusqu’au troisième opus, mais aussi avec l’annonce de Metal Gear Solid Delta: Snake Eater, remake de ce dernier, sorti initialement en 2004 sur PS2. Développée par Virtuos et Konami, cette version consiste à proposer une refonte graphique sous Unreal Engine 5 avec quelques nouveautés embarquées. Faisant office de point de départ d’une chronologie tentaculaire et théâtre de l’avènement d’un soldat légendaire, quel beau symbole alors que de revoir ce troisième épisode version new look débarquer presque 20 ans après l’original, mais aussi presque 10 ans après le dernier opus majeur commercialisé.
Un remake parfait pour toucher les néophytes ? Une refonte qui convaincra les fans, y compris les plus attachés au matériau originel ? Ou, tout simplement, un titre qui arrive à trouver sa place en 2025 ? Pas mal de questions entourent ce Metal Gear Solid Delta: Snake Eater, et nous allons tenter d’y répondre dans ce test en marge de la sortie du jeu le 28 août sur PS5, Xbox Series et PC.
Conditions de test : Nous avons joué 28 heures à Metal Gear Solid Delta: Snake Eater Digital Deluxe Edition sur PS5 en version 1.001.001 (1.1.1 in-game). Ce temps nous a permis de finir l’aventure en difficulté Normal et en mode Nouveau Style, de récupérer tous les collectibles, et de terminer le mode Snake vs Monkey. Une deuxième partie a également été débutée en mode Style Légendaire pour comparer les deux jouabilités. L’édition Digital Deluxe apporte des skins dont certains facilitent quelques aspects du gameplay. Nous ne les avons pas exploités pour notre première partie.
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ToggleKonami s’attaque au Boss
Sur le papier, le défi est énorme pour Virtuos et Konami. Toucher à Metal Gear, c’est se lancer sur une route sinueuse sans garde-fou. Mais Metal Gear Solid 3: Snake Eater, qui est souvent considéré à la fois comme l’épisode le plus réussi et le plus apprécié de sa communauté — en dépit de ventes moindres par rapport aux autres — c’est un challenge que personne n’aurait osé imaginer il y a encore quelques années.
Alors face à l’annonce en 2023 de ce remake Metal Gear Solid Delta: Snake Eater, et malgré une subliminale euphorie, la méfiance a donc prédominé. Hideo Kojima, même si tout le monde pouvait s’en douter, n’est en rien impliqué dans le projet. À partir de là, et au vu des premières images dévoilées, le public a fini par comprendre à quelle sauce Snake allait être de nouveau mangé : une refonte surtout visuelle, en gardant intact le script, la mise en scène, l’agencement des niveaux, bref, sans réellement altérer l’œuvre en tant que telle.
Celles et ceux connaissant l’intrigue de Metal Gear Solid 3 ne découvriront donc rien de nouveau. Pour les autres, on suit le soldat au nom de code « Naked Snake » à travers une mission initiatique chargée en péripéties. Une aventure posée sur une lourde toile de fond historique, en pleine période de Guerre froide. Secrètement envoyé dans la jungle russe par les États-Unis, il doit mettre la main sur Nikolai Stepanovich Sokolov, un scientifique originaire de la Mère Patrie pour le ramener en sécurité sur le sol américain.
Un homme dont les compétences lui ont valu d’être ballotté entre États-Unis et Union Soviétique sur coups de pression diplomatique. Tellement talentueux qu’il joue un rôle absolument décisif dans l’avenir du monde en travaillant sur une arme nucléaire novatrice et mobile : le Shagohod. L’objectif est donc, en quelques mots, d’empêcher la fin du monde en lui évitant de terminer un tel projet, qu’il ne veut de toute manière pas concrétiser, conscient de la catastrophe imminente.
Tactical Espionage Buisson
Aidé via radio par le reste de l’unité Fox composée par Major Zero, le leader, Para-Medic, assistante médicale et en survie, et The Boss, soldate experte et mentor de Snake, notre héros va prendre la mesure des convoitises qu’attise Sokolov. Sa mission lui réservera bien des surprises, entre révélations cinglantes, rebondissements douloureux et un corps ainsi qu’un esprit mis à rude épreuve. Metal Gear Solid oblige, le récit est en grande partie rythmé par de nombreuses cinématiques, à l’époque ambitieuses et souvent over the top, et de longues séquences de radio en compagnie de l’unité Fox. Le tout est porté par des personnages qui crèvent l’écran, diablement bien incarnés par des comédiens et comédiennes de doublage de talent.
Et l’autre partie de l’expérience, bien entendu, se trouve dans son gameplay action-infiltration avec, dans cet opus, une part belle faite à la survie. Rien de très contraignant, mais il faut cette fois nourrir Snake grâce aux espèces animales et végétales présentes sur place, et procéder à des petites séquences d’auto-chirurgie en cas de blessures graves par balle, de brûlures ou de coupures. Un aspect survie prépondérant pour le gameplay malgré un côté gadget ludiquement parlant, au contraire du système de camouflage basé sur un pourcentage (100% étant « invisible »).
Face à des ennemis au champ de vision bien plus développé que MGS 1 et 2, et dans un environnement naturel toujours linéaire mais légèrement plus ouvert que par le passé, l’arrivée des tenues et des peintures de visages rend nécessaire le fait de se mouvoir incognito en fonction du terrain.
Via ce troisième opus, la recette Metal Gear Solid s’est donc vue bonifiée dans sa partie discrétion. Enfin, presque, puisque le maintien de la caméra fixe, couplée au retrait du radar indiquant la position des ennemis et la structure de la zone, rendait l’infiltration non seulement peu évidente, mais aussi parfois fastidieuse en ayant souvent recours à la caméra à la première personne. L’arrivée un an après d’une nouvelle version pour Metal Gear Solid 3, appelée Subsistence, s’est imposée comme un bol d’air frais en proposant une caméra libre, facilitant allègrement l’appréciation du level design et permettant de découvrir l’aventure littéralement sous un autre angle.
Alors si nous avons consacré autant de temps dans une double partie introductive avant de se plonger dans ce remake Delta, c’est pour situer dans quel contexte il débarque 20 ans plus tard. Car après avoir revu Metal Gear Solid 3 dans une compilation HD en 2011, dont un portage fut fait dans le cadre de la Master Collection Vol.1 en 2023, savoir que Delta restera dans les clous interroge sur la pertinence d’un retour.
Une seconde peau pour Snake


Le principal intérêt, on l’a dit, réside dans cette refonte graphique totale sous Unreal Engine 5. Personnages, végétation, animaux, sol, parois, vêtements, tous les modèles et textures ont été retravaillés. On dispose également d’une lumière plus réaliste et de détails visuels renforçant l’immersion, comme les pores de la peau visibles ou les veines saillantes de notre musculeux Snake. La boue se colle temporairement à ses vêtements, de quoi influencer le score de camouflage. Une règle tout autant valable pour les feuilles, qui finissent par tomber petit à petit. Du côté des blessures de Snake, une fois guéries, leurs cicatrices restent visibles de manière durable sur le corps.
Ces petits pas effectués en direction de l’authenticité, que l’on salue, auraient pour le coup mérité d’être accompagnés par une DualSense exploitée. Or, rien au niveau des vibrations, et pour les gâchettes, ce qui est curieux, c’est qu’il existe justement un paramètre modifiant leur intensité. Or à aucun moment nous n’avons senti une quelconque résistance. Une fonctionnalité à venir avec un patch day one ? On espère.
Outre les détails, la qualité graphique repose aussi sur les différents affichages à notre disposition. Les très classiques Mode Qualité et Mode Performances répondent présent, avec un affichage 4K upscalée depuis du 1440p natif bloqué à 30 fps pour l’un, et de la 4K upscalée depuis du 1080p natif allant jusqu’à 60 fps pour l’autre. On dit bien « jusqu’à », pour le Mode Performances, car si le début de l’aventure est très doux, le framerate subit régulièrement des sautes par la suite. Pareil vis-à-vis d’un clipping assez grossier par moment, que l’on espère là aussi atténué via des patchs. Quant à l’optimisation PS5 Pro, elle existe, mais nous n’avons pas pu en mesurer les bienfaits.
Finalement, et incontestablement, Metal Gear Solid Delta: Snake Eater fait beaucoup de bien à la rétine, même si on ne tombe pas forcément de sa chaise non plus. De plus, bénéficier d’un rendu plus réaliste efface forcément le charme de la version PS2, avec son fameux « filtre pipi » caractéristique. Une sensation renforcée par le nouveau design des visages des personnages. On avoue qu’au départ, on ne sait pas trop quoi en penser. Plus on a en tête les designs originaux, plus leur version Delta surprend. Mais finalement, on s’habitue rapidement.
Par exemple, et pas toujours pour de bonnes raisons, le visage de The Boss a fait parler lors de son reveal. Personnage ô combien emblématique de cet épisode, la soldate légendaire faisait preuve d’un charisme désarmant, avec des traits renforçant la froideur et l’intimidation dont elle pouvait faire preuve. Mais même si son faciès est fatalement différent ici, elle garde son aura. Idem en ce qui concerne Volgin et la plupart des personnages. Il faut dire que le doublage impeccable d’époque est repris à l’identique, et que la synchro labiale est désormais présente, ce qui aide beaucoup.
Non, ce qui dénote davantage, ce sont surtout les expressions faciales et les animations de ces modèles de personnage. On le répète, toutes les cinématiques sont calquées sur celles du jeu original à au moins 95%, pour ne pas dire 100%. Or pour un titre souhaitant miser sur le réalisme, vouloir faire passer des émotions en 2025 ne repose pas sur les mêmes moyens et astuces qu’en 2004.
Ces nouveaux visages plus détaillés restent donc bridés par les manières de les faire s’exprimer coincées à l’époque PS2. Etant donné que les cinématiques étaient absolument impeccables à l’époque, il n’y a rien ici qui nous fera techniquement sortir de la narration. Simplement, on atteint là quand même une certaine limite du remake fidèle.
Et ce ne sont pas certains choix de mise en scène qui, déjà pas vraiment pertinents à l’époque, font souffler du nez. La possibilité de passer en mode gros plan pour mater les seins d’Eva, par exemple, n’est pas ce que la saga nous a sorti de plus inspiré, et ce même si c’est au nom d’une légèreté caractéristique de son ton, cassant le côté sérieux dont elle peut faire preuve le reste du temps.
Un gameplay sur le python ?
Après les graphismes, un autre chantier préoccupait : quid du gameplay ? Sur ce point, Konami n’a pas trop tardé à communiquer en spécifiant qu’il y aurait deux manières de jouer à Metal Gear Solid Delta: Snake Eater. La première, le Style Légendaire, consiste tout simplement à reprendre la caméra de la toute première version de MGS 3. Celle aux plans semi-fixes qui suit les déplacements de Snake tout en affichant une perspective réduite de son environnement. Une expérience censée se trouver au plus près des sensations originelles.
La deuxième, et la plus intéressante pour ce remake, s’appelle tout bonnement le Nouveau Style. Non seulement on dispose d’une caméra libre à 360°, comme dans Subsistence, mais aussi d’un nouvel HUD dont chaque élément peut être affiché ou non. Plus important, Snake a en plus hérité de nouveaux mouvements. Il est désormais possible de se déplacer accroupi, ce qui crée enfin le compromis entre la rapidité de mouvement de la position debout, et la discrétion de celle allongée.
Aussi, et surtout, Snake peut maintenant viser librement à la troisième personne tout en se déplaçant, avec n’importe quelle arme, y compris les lourdes comme le RPG-7 ou le fusil sniper SVD. Et ceci est valable pour toutes les positions, y compris allongée, et même en caméra à la première personne, où nous ne sommes plus bloqué sur place en l’utilisant. Snake gagne par ailleurs le fait de viser tout en rampant sur le dos. En découle alors une approche tendant légèrement vers celle d’un Metal Gear Solid V: Phantom Pain, ce qui est un vrai bonheur.
Une fois que l’on s’adapte à la nouvelle disposition des boutons, plutôt convaincante, tout s’effectue de manière plus naturelle qu’avant. On en veut pour preuve le test d’un retour au Style Légendaire qui, par défaut, picote au niveau de l’ergonomie. On se rend compte aussi que l’équipe de développement s’est retrouvée embêtée au sujet du déplacement accroupi. Mouvement absent dans l’original, on le rappelle, il a quand même été incorporé dans le Style Légendaire. Simplement, la vitesse de déplacement a été réduite. Ça fait donc bizarre, mais sans doute était-ce nécessaire pour ne pas trop dénoter avec le Nouveau Style.
La bonne nouvelle c’est que devant le choix de ces deux styles, on peut mixer les plaisirs. Il est tout à fait envisageable de vouloir la nouvelle caméra avec des touches et un HUD old school, et inversement. Une personnalisation tout aussi valable au niveau des filtres graphiques disponibles, comme Sépia, Rétro, Monochrome ou Classique. Précision importante, commencer dans un style ne vous empêche pas de basculer à tout moment sur l’autre. La manipulation demande juste de recharger le dernier point de sauvegarde.
L’effet Twin Snakes
Mais pour en revenir à la maniabilité moderne et au confort qu’elle apporte, un double effet Kiss-Cool joue en la défaveur de Delta. Rappelons-nous le cas du remake du premier épisode Metal Gear Solid: Twin Snakes. En apportant les possibilités du gameplay de MGS 2 telles que la visée libre à la première personne, la suspension aux rebords ou encore le braquage des ennemis, et ce tout en laissant intact le level design, l’initiative a eu pour conséquence de casser le jeu.
Eh bien avec ce Metal Gear Solid Delta: Snake Eater, à moindre mesure, certes, l’effet est un peu similaire. Il a pourtant semblé que la question de l’équilibrage entre les deux styles de jeu possibles fut au centre du développement, et sans doute a-t-elle débouché sur des ajustements dont la subtilité nous a peut-être échappé. Maintenant, de notre ressenti de joueur ayant connu toutes les versions de MGS 3 en mode Normal, jouer à Delta en Nouveau Style dans cette difficulté est de loin la plus simple des configurations pour cet épisode. Viser librement tout en se déplaçant facilite l’élimination des ennemis dans la très grande majeure partie des cas. Le plus embêtant, c’est que même l’approche de quelques boss change significativement.
L’unité Cobra, destinée à barrer la route de Snake, offre des affrontements variés, et mémorables à l’époque, où chaque membre met en avant sa force. Malheureusement, un boss comme The Fear, censé faire peser sur nous une menace constante, pouvant frapper à tout moment et depuis nulle part, devient presque ridicule en le suivant à la trace en visée libre, équipé d’un équipement bien particulier. Le tout premier boss, aussi, consiste en un face à face où l’on doit attendre le moment adéquat pour se découvrir, tout en profitant des erreurs d’inattention de notre adversaire. Mais là encore, le suivre à la loupe tout en amorçant une visée, bien caché derrière les rochers, facilite les débats.
Et puis certains mouvements du gameplay original deviennent carrément obsolètes. Le plaquage contre un mur, par exemple, mouvement historique de la saga offrant notamment la possibilité d’observer sans être vu, voire de dégainer en approchant d’un coin, ne sert quasiment plus à rien, hormis pour franchir les rares corniches présentes à quelques endroits. Pour gérer les ennemis, il suffit en effet de viser en se collant au mur, puis de se décaler pour tirer. Une méthode plus fluide, plus instinctive, plus efficace.
Le temps, c’est de l’argent
À côté de ça, il existe une poignée de nouveautés assouplissant l’ensemble sans forcément le dénaturer, ce qui consiste souvent à diminuer les allers-retours fastidieux entre menus. Le changement de camouflage dynamique fait énormément de bien par exemple. Au lieu de modifier manuellement la tenue de Snake et sa peinture de visage, on peut ouvrir un menu rapide proposant différentes associations prédéfinies, accompagnées de l’évolution du score de camouflage selon notre choix.
L’initiative est parfaite pour coller à chaque instant à l’environnement traversé, moyennant un micro-temps de chargement. Seul petit bémol, il arrive que les suggestions de camouflage ne soient pas les plus optimales, et qu’un passage manuel par le menu montre qu’il y a encore quelques pourcentages à gratter.
Autre fonctionnalité sympathique, l’accès rapide aux fréquences Codecs. Lorsque que l’on sait la mine d’informations optionnelles, de conversations drôles et autres dialogues secrets offerts par Para-Medic, Major Zero, ou Sigint, l’expert en armement, on apprécie le fait d’accéder à l’un d’entre deux via le maintien d’un bouton raccourci. Et puis c’est aussi une façon directe de sauvegarder manuellement sa partie.
Notons d’ailleurs qu’une fonctionnalité de sauvegarde automatique fait son apparition, et qui se déclenche à chaque changement d’écran. Un ajout obligatoire en 2025, mais qui là encore casse complètement l’enjeu de la traversée d’une zone. Les fans auront aussi directement compris ce que ça implique pour l’un des plus gros challenges du jeu. Si l’on vous dit « FOXHOUND »… ?
Enfin, d’une manière générale, la part belle est faite à une facilité d’accès, confirmant que le public néophyte a été considéré. Toute une ribambelle de conseils et de tutos sont à retrouver à tout moment. Des mouvements élémentaires aux astuces les moins frappantes, rien d’utile ne nous échappe vraiment. Ca va même encore plus loin : à chaque combat de boss lancé, et dès le départ, le menu Conseils explique comment battre le boss, indiquant ses faiblesses ou décrivant certains patterns. Des informations que l’on était jadis censé récolter soit par l’expérience, soit grâce au Codec.
Et lorsqu’une info n’est pas à chercher dans le menu dédié, des boutons apparaissent directement en jeu pour rappeler une action possible. On pense surtout à l’utilisation du CQC, la technique de combat rapproché introduite par ce troisième opus. A l’époque, il fallait regarder dans le manuel pour voir tous les mouvements faisables, à l’exécution pas forcément simple à appréhender, puis les retenir. Là, et au moment de saisir un ennemi, tout nous est rappelé de manière contextuelle, que ce soit l’interrogatoire, le bouclier humain ou le tranchage de gorge. Un gain de lisibilité qui fait plaisir.
Un serpent goût doux-amer
Autre commande contextuelle, lorsque l’on subit une blessure grave, on nous incite tout de suite à nous soigner en proposant un accès rapide au menu de soin à la pression d’un bouton. Idem à l’acquisition d’une nouvelle arme ou d’un nouvel objet, afin de l’équiper instantanément si besoin. Que les habitués se rassurent, l’apparition des conseils peut être réduite, voire tout bonnement supprimée. Une option à choisir en début de partie.
À l’inverse, des ajouts comme la boussole laissent indifférent. Vu que l’on dispose d’emplacements limités pour attribuer des objets, et que notre destination est visible à tout moment sur la carte, la boussole devient en effet rapidement dispensable. Pire, quelques aspects du jeu original symptomatiques d’une époque passée sont toujours là et dénotent ici encore plus, compte tenu de la souplesse gagnée ailleurs.
Certains pourraient mentionner par exemple une structure délimitée par écrans, où le passage de l’un à l’autre nécessite toujours un fondu au noir. Le maintien d’un tel level design s’explique par le scope du remake, mais difficile de ne pas nous renvoyer 20 ans en arrière. Cela étant dit, nos pensées se dirigent surtout à cette fameuse séquence d’escorte complètement anachronique et encore plus agaçante qu’elle ne l’était déjà à l’époque.
Lorsque l’on tient compte de tout ce que l’on vient de décrire, l’impression globale du gameplay Delta amène une double lecture. Les sensations sont bonnes, familières, et le plaisir de retraverser cette aventure via ce remake est garanti. Seulement, impossible de ne pas sentir dans le même temps une baisse de tension dans le gameplay, et un équilibrage penchant encore davantage de notre côté. Quelle place doit-on accorder à l’accessibilité ou la modernité vis-à-vis de la préservation de l’essence de l’oeuvre initiale ? C’est la question à 100 milliards de dollars à laquelle il n’existe aucune réponse universelle, mais elle se pose encore ici.
L’ouverture à un nouveau public reste en tout cas louable, mais elle ne peut pas aller au bout de sa logique en raison d’un remake cloisonné entre les murs de l’original. La démarche nous amène ainsi à un entre-deux où le travail abattu pourrait ne pas s’avérer optimal ni pour accueillir une part des personnes habituées à des productions récentes, ni pour offrir une expérience suffisamment rafraîchissante auprès des fans attachés à un jeu de base qu’ils connaissent par coeur. Reste alors un éventuel bonheur à trouver du côté du contenu embarqué.
GA-KO !
Si Metal Gear Solid Delta: Snake Eater ne compte pas chambouler fondamentalement le matériau de base, on pouvait tout de même espérer quelques bonus ici et là, du fan service ou encore, pourquoi pas, un peu de contenu supplémentaire. Et ne le cachons pas, ce qui nous a le plus animé reste la quête des collectibles. Les Kerotan reviennent logiquement, à leur place identique d’ailleurs, sauf qu’ils sont cette fois accompagnés des GA-KO.
Ces petits canards répondent également au nombre de 64 et fonctionnent de la même manière que les grenouilles, à ceci près qu’ils sont légèrement camouflés par des feuilles, les rendant plus difficiles à repérer. Certains sont donc bien cachés, mais le jeu en vaut la chandelle puisque les trouver dans leur intégralité nous rapporte évidemment une récompense que nous tairons ici.
Afin de mener cette chasse dans de meilleures conditions, nous saluons un suivi de ces collectibles plus clair qu’avant. Un Kerotan ou un GA-KO touché ne s’arrêtera jamais de tourner sur lui-même, et une coche sera affichée ou non sur le menu Pause de la zone en question, ainsi que sur la carte, à l’emplacement où la figurine a été touchée. Encore mieux, elles sont conservées d’une partie à l’autre. Pas besoin de tout refaire si jamais quelques-unes ont pu être oubliées.
Ce n’est pas tout, un autre collectible inédit rejoint Delta. Des soldats bien précis portent sur eux des bobines de film. Les récolter nous délivre quelques surprises à consulter au sein du Secret Theater, de retour pour l’occasion. La subtilité, c’est que ce n’est pas si simple que ça de récupérer ces bobines. Il faut braquer les ennemis par derrière et les intimider pour qu’ils lâchent leur collectible.
Sauf que le moindre contact physique, causé par n’importe quel tir d’arme, coup de poing, prise de CQC ou même une simple poussette, casse la bobine, obligeant à recharger la zone. Un petit challenge sympathique qui nécessite parfois de bien planifier son approche. Les soldats choisis sont en effet régulièrement les moins simples à appréhender au sein de la zone en question.
Passées les joies de la collecte, il ne reste plus vraiment grand-chose d’inédit à se mettre sous la dent afin de remettre le couvert. Bien sûr, il y a la récupération des achievements, qui justement intègrent les Kerotan et les GA-KO, diverses actions spécifiques ou bien la récupération de l’intégralité des espèces animales et végétales, au même titre que le déblocage de l’intégralité des camouflages et peintures de visage. Un suivi de progression que l’on peut désormais retrouver au sein du menu principal.
On ne joue que deux fois
Alors oui, le mode « Snake vs Monkey » reprend le crossover bien barré avec Ape Escape, mais terminer tous les niveaux, y compris en obtenant le meilleur temps, ne devrait pas vous occuper plus qu’une heure environ. Gardez juste l’oeil bien ouvert pour apercevoir un invité surprise. Quant à la version Xbox intégrant un mini-jeu Bomberman, on ne va pas pouvoir se prononcer même si on imagine une durée de vie similaire. À part ça, le très classique mode Théâtre nous permet de revoir les cinématiques débloquées et celles qui nous manquent.
Le plus étrange reste l’absence du mode Duel, une sorte de Boss Rush présent dans certaines versions de MGS 3. L’avoir ici n’aurait pas été du luxe, surtout que la principale attraction du contenu supplémentaire de Delta n’est finalement pas disponible au lancement. Fox Hunt, mode multijoueur inédit, n’arrivera en effet que cet automne. Dommage car l’idée de s’affronter en ligne dans des parties de cache-cache géants basées sur la gestion du camouflage aurait pu servir l’intérêt du remake à son lancement. Face à ce délai d’attente supplémentaire, est-ce que l’engouement du public sera aussi fort le moment venu ? Il n’y a qu’à le souhaiter. Cependant, l’absence confirmée d’un cross-play ne jouera pas en sa faveur, c’est certain.
Faute d’éléments inédits poussant la rejouabilité, il reste alors l’école du fan puriste, qui s’amusera au jeu des sept différences durant tout le jeu. Une activité d’autant plus vraie au sujet des easter eggs plus ou moins célèbres du jeu base, dont les mordus s’empresseront de vérifier la présence ou leur version remakée. Nous ne dirons rien, simplement que nous avons nous-mêmes été curieux à ce sujet…
Aussi, nous n’avons pas la prétention de connaître par coeur les conversations Codec, et c’est pourquoi nous ne nous engagerons pas sur la teneur des changements (ou non) apportés par Delta, bien que l’on sache que de nouvelles phrases ont été enregistrées pour l’occasion. Si cela concerne surtout les phrases de tuto, on a aussi pu noter une subtilité dans l’une des conversations avec Para-Medic au sujet du film Godzilla de 1954. Dans le MGS 3 original, la docteure invite Snake à aller le voir en 2004 pour les cinquante ans du film, tandis que dans le remake, elle parle de ses soixante-dix ans, pour coller à 2024.
Un détail infime, qui n’apparaît d’ailleurs qu’en mode Nouveau Style. Car oui, outre la caméra et le gameplay, notre choix entre les deux styles conditionnera aussi quelques éléments précis. L’écran titre, par défaut inédit en affichant des images du jeu, peut tout à fait reprendre les animations stylisées de CQC du jeu de base, pour peu que l’on ait lancé le jeu en Style Légendaire.
Pareil au niveau du cultissime générique façon James Bond chanté par Cynthia Harrell et réalisé par Kyle Cooper. Le Nouveau Style nous laissera apprécier une version retravaillée pour l’occasion tandis que le Style Légendaire jouera l’originale. On va être franc, on préfère la version 2004, mais quel plaisir de profiter d’une reprise inédite, elle aussi capable de tirer des larmes et dresser quelques poils. Soulignons d’ailleurs que quelle que soit la version du générique, toute l’équipe originale est créditée. Oui, Hideo Kojima a donc droit à sa (ses) mention.
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