Initialement annoncé en 2019, Hotel Barcelona a tout de suite intrigué pour une raison très simple. Ce jeu est le fruit de la collaboration entre Suda Goichi (Suda51) et Hidetaka Suehiro (Swery), deux créateurs japonais, connus pour leurs jeux et leurs idées complètement décalés. Par exemple No More Heroes du côté de Suda51 et le complètement cassé Deadly Premonition pour Swery. Vous l’aurez compris, cette association nous rend aussi intéressés que circonspects.
Condition de test : On a joué une dizaine d’heures à Hotel Barcelona sur PC, suffisant pour compléter l’entièreté du jeu et affronter tous les boss, y compris optionnels.
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Hotel Barcelona fait le choix de nous jeter directement dans le bain en commençant par une séquence de gameplay sans aucun tutoriel, jusqu’à votre première mort (et ça peut aller très, très vite). Cette séquence annonce déjà la couleur. Elle tourne en 15 FPS grand maximum. Effectivement, on savait à quoi s’attendre en lançant un jeu de Swery. Heureusement, cela ne dure pas. Après cette mort, le jeu adopte une structure plus classique, avec une scène d’introduction animée fort sympathique, un vrai tutoriel et un peu plus de fps.
On a précisé « jeu de Swery » parce que oui, même si Suda51 est crédité dans « Idée originale », on sent que son apport au projet a été très limité. Le jeu étant développé par White Owl Inc., c’est avant tout la boîte de Swery. Et ça se ressent rapidement. Rien qu’avec le titre, comme d’habitude, ils ont choisi un nom qui rend le jeu introuvable sur internet comme The Missing ou The Good Life. Plus sérieusement, il y a également beaucoup de références à ses précédents travaux.
Vous voilà prévenus, on pardonne plus facilement les problèmes techniques et les idées décalées quand on sait où on met les pieds. Et des idées, le jeu en regorge. Certes, elles ne sont pas toujours bonnes mais on salue l’originalité et le fun derrière la plupart.
Au niveau du scénario, Hotel Barcelona dénonce un grand nombre de sujets, sûrement un peu trop. On ne sait pas toujours quel est le vrai point de vue du jeu, tellement les différents personnages sont diamétralement opposés. Le tout est raconté par le biais d’une histoire de vengeance saupoudrée de pouvoirs mystiques, complétée par des dialogues un peu ringards. Justine, l’héroïne, est une marshal des États-Unis. Elle est possédée par un tueur en série immortel et va utiliser son pouvoir pour se venger de la Sorcière, une autre tueuse en série, en abattant sur sa route de nombreux criminels de la même trempe. Vous l’aurez compris, Hotel Barcelona ne brille pas par sa narration.
Hotel of the Dead
Hotel Barcelona ne se vend pas comme ça, mais il partage beaucoup de mécaniques avec les roguelikes. Dans les niveaux, la mort renvoie au hub principal et les améliorations récupérées sont perdues. En revanche, tout ce qui est acheté dans l’hôtel est conservé. Cela comprend une boutique d’armes et un arbre de compétences rempli principalement de passifs inutiles.
Les matériaux nécessaires à cet arbre ne se conservent pas entre les runs. C’est une mécanique qui est plus intéressante qu’elle en a l’air, surtout combinée aux autres idées sur lesquelles on reviendra plus tard. En effet, cela pousse à relancer les niveaux rapidement sans trop se poser de questions.
Cette notion de boucle va de pair avec la mécanique des fantômes. Jusqu’à deux fantômes peuvent vous accompagner lors de vos sessions. Il s’agit de vos précédents essais : ils vont reproduire à l’identique les mouvements que vous avez faits. Au premier abord, cela semble peu utile, mais force est de constater qu’en action, on passe souvent au même endroit et on reproduit souvent les mêmes actions. Jouer en prenant en compte les fantômes devient étrangement plaisant.
En revanche, le jeu est découpé en niveaux, ce qui l’éloigne de cette base du roguelike et semble nuire à la fluidité et à la relance naturelle des parties. Mais ce n’est pas vraiment le cas, bien au contraire, du moins à partir d’un certain moment. À la fin d’un niveau, on vous propose de lancer le niveau suivant en gardant toutes vos upgrades (ou de relancer le premier niveau quand vous atteignez le dernier). Cela est impossible au début, mais ensuite vous pourrez enchaîner les niveau et découper tous ces tueurs. Le sentiment de puissance est réellement présent.
C’est assez laborieux d’en arriver là car le gameplay reste très rigide pour un jeu de 2025 et le peu de combos disponibles au commencement rend tout ça répétitif. Et on ne peut pas compter sur les ennemis pour apporter ce besoin de variété : ils sont tous très similaires et les patterns des boss ne sont pas particulièrement bien pensés. Un mal pour un bien, on n’aura pas trop l’occasion de voir ces patterns. Les boss vont soit nous exploser en deux secondes, soit subir l’inverse lorsque l’on les atteint avec plusieurs fantômes et notre attaque ultime, qui va presque à coup sûr les étourdir.
Just’une idée
Côté graphisme, la 3D n’est pas très fine, pour rester poli. C’est dommage, car les visuels et les designs des personnages sont au contraire très réussis. Il s’agit d’Hiroaki Hashimoto, connu principalement pour son travail chez SNK, notamment sur The King of Fighters, qui s’est occupé des artworks.
Ce n’est pas le seul domaine où Hotel Barcelona se remarque. Les cinématiques avant chaque boss sont originales et de très bonne facture. Et les doublages retranscrivent facilement les différentes émotions. Ce respect artistique rend d’autant plus étonnante l’utilisation d’IA générative dans certains easter eggs du jeu. White Owl Inc. a annoncé vouloir retirer tout contenu généré par l’IA, mais au moment de la sortie de ce test, cela n’a pas encore été fait.
Et pourtant, malgré cette liste de défauts colossale, Hotel Barcelona respire la passion. Ça le rend particulièrement fun. Le jeu est rempli de références aux classiques d’horreur, qu’ils soient anciens ou récents. C’est une vraie lettre d’amour à ces univers cinématographiques, et de manière flagrante (on sait qui tu es, Nigel Nayers). En plus, on soupçonne Swery d’avoir ajouté la traduction catalane uniquement pour référencer le titre Hotel Barcelona.
IIl y a plein d’idées comme ça, un peu absurdes. Certaines sont plus impactantes. Par exemple, de manière aléatoire, Justine peut commencer un niveau en étant minuscule ou alors géante. Ce n’est jamais expliqué, ça n’a aucun sens, mais… c’est amusant donc on accepte l’idée.
On ne pouvait pas finir ce test sans parler de la meilleure idée du jeu : le multijoueur. Vous vous attendez peut-être à de la coop, grand classique du roguelike. Que nenni ! Ici, on peut envahir la partie d’autres joueurs qui n’ont rien demandé. La majorité du temps, ils seront en train de galérer à terminer un niveau et vous allez arriver en pleine forme et anéantir tous leurs espoirs en moins de 5 secondes. De plus, c’est obligatoire de le faire une fois pour terminer le jeu. C’est diabolique et tout simplement hilarant, justement parce que cela n’a aucune raison d’exister.
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