Warm Lamp Game est un studio basé en Sibérie et fondé en 2015. Il s’agit donc de leur première création même si beaucoup de membres sont des professionnels du milieu qui ont une certaine expérience. Voyons si Beholder saura nous impressionner.
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Les jeux indépendants ne manquent pas d’originalité en termes de gameplay et d’ambiance. Beholder est l’un d’eux, et nous transporte dans un contexte très sombre et très dur puisque l’action prend place dans un Etat totalitaire, voire une dictature. On peut aisément imaginer que les développeurs se sont inspirés de l’URSS sous Staline pour leur titre, toutefois, rien n’est explicite puisque cet univers dystopique est purement fictif. On peut aussi faire quelques parallèles au Franquisme ou au Nazisme, mais il ne s’agit pas là d’un jeu engagé ou historique.
Ce décor est seulement là pour mettre le joueur face à des situations difficiles. Ce dernier incarne donc Karl Stein, le nouveau gardien d’un immeuble résidentiel. Engagé par le gouvernement pour accomplir ce travail, on comprend rapidement que cet emploi comporte bien plus que du simple gardiennage. En effet, vous êtes surtout chargés d’espionner et de rapporter les moindres faits et gestes de vos résidents, et de les dénoncer aux autorités si jamais ils ne respectent pas les directives du gouvernement. Et quand on voit ce qu’il advient de votre prédécesseur au tout début du jeu, on se rend très vite compte que filer un mauvais coton peut coûter gros.
En plus d’une ambiance parfaitement retranscrite, l’originalité du titre est qu’il ne s’agit pas de prendre des décisions bonnes ou mauvaises pour arriver à un aboutissement. Ici, vous êtes constamment devant des choix qui sont toujours cornélien. En plus d’influer sur le destin de vos locataires, c’est essentiellement votre survie et celle de votre famille qui est constamment en jeu. Attendez-vous donc à mourir souvent et expérimenter différents scénarios tout aussi noirs les uns que les autres.
On récolte ce que l’on sème
Beholder est un pur «Die & retry» scénaristique, on est souvent surpris de la tournure que prennent les événements par rapport à nos choix. Le game over correspond bien évidemment à la mort de Karl, mais elle survient de différentes façons à chaque tentative. Tout est fait pour vous attirer des ennuis d’une manière ou d’une autre. Même en apprenant de ses erreurs, le soft arrive à nous surprendre plus d’une fois. La prise en main est simple, nous avons une vue d’ensemble sur l’immeuble en deux dimensions avec les étages, le sous-sols, et les abords de la bâtisse. On déplace Karl d’un simple clic, et il suffit de cliquer sur un élément pour choisir une action. Il y a trois éléments majeurs à prendre en compte. Le temps, l’argent, et la réputation.
Les tâches principales ainsi que les quêtes secondaires sont limitées dans le temps. Le ministère en charge vous rappelle d’ailleurs de ne pas trop traîner sur les missions importantes qu’il vous confie sous peine de sanctions. Ensuite nous avons l’argent, le nerf de la guerre. C’est l’élément qui va vous rendre fou tellement le manque se fait vite ressentir. Entre les amendes, les frais de l’immeuble, les besoins de votre famille, et les achats au marché noir, nous sommes vite dépassés par les coûts astronomiques qu’impose cette dictature. De ce fait, les récompenses octroyées par vos bons et loyaux services ne suffisent largement pas.
Pour combler, vous serez obligatoirement forcés d’employer des méthodes illégales. Du chantage envers un locataire, revendre de la marchandise volée, ect. Il faut sans cesse jongler entre vos actions frauduleuses et votre action gouvernementale. Il est plaisant de tester les limites de cette équilibre très fragile. Les points de réputation s’obtiennent en aidant les locataires et votre famille via les quêtes secondaires ou en récoltant des informations de toutes sortes sur les gens. Ces points servent essentiellement à l’achat de caméras de surveillance, et du matériel de réparation nécessaire à l’entretien de l’immeuble.
Comme si cela ne suffisait pas, vous serez, en plus, confrontés à une force d’opposition au régime totalitaire du pays. Là aussi, vos décisions de les aider ou non dans leur quête de révolution sera une part importante de vos choix d’autant plus que les décisions ne seront, encore une fois, pas si facile à prendre. Rien n’est tout noir ou tout blanc, et cela malgré vous. Ainsi, même en voulant être le parfait toutou du gouvernement ou un opposant pur et dur, vous serez obligatoirement forcés de nuancer votre orientation. On évitera de spoiler, car ces «surprises» font partie intégrante du plaisir de jeu. Sans être forcément masochiste, il est agréable de se prendre des game over que l’on n’a pas vu venir à 20 kilomètres.
L’art de la délation
Bien loin d’un James Bond, votre métier d’espion consiste à établir des profils en surveillant vos locataires à leur insu via les caméras de surveillance soigneusement installées pendant leur absence. Pendant qu’ils sont de sorti ou au travail, vous pouvez également fouiller un peu partout pour récolter différentes informations, et pourquoi pas trouver quelque chose de compromettant contre eux. Une fois la récolte accomplie, vous pouvez établir un profil et l’envoyer au gouvernement qui vous rémunère généreusement.
Vous pouvez dénoncer un acte illégal commis par un locataire ou utiliser cette infraction dans une lettre de chantage comme énoncé précédemment. Et les raisons ne manquent pas pour confronter les personnes à la loi. Régulièrement, le gouvernement envoie de nouvelles directives à respecter. Lire un livre d’un auteur interdit, posséder une arme, et même manger une pomme sont autant d’exemples que vous rencontrez au cours du jeu. Elles deviennent de plus en plus absurde au fil du temps, et ce paramètre à prendre en compte remet une couche de difficulté pesante. Et pas dans le sens péjoratif du terme.
Malgré le plaisir que l’on a à parcourir les différentes possibilités qu’offre le soft, un gros défaut inévitable vient ternir ce beau tableau morose. Les événements et autres quêtes suivent un cheminement ultra linéaire, du coup il devient rapidement laborieux de recommencer encore et encore les mêmes choses. Comme à l’accoutumée avec ce genre de jeu, les premières heures sont un régal, mais seuls les puristes et fans du genre pourront accepter de subir plusieurs heures de jeu identiques pour changer un petit détail, et tester toutes les fins.
Une traduction française bâclée
Ce n’est pas son seul gros défaut, mais nous allons y venir. Avant ça, un peu de positivisme pour saluer l’aspect graphique de Beholder qui est agréable à l’œil. Les décors sont assez jolis, mais c’est surtout le contraste avec les personnages en noir et blanc qui lui donne une certaine identité visuelle. On ressent, à travers ce choix artistique anodin à première vue, l’ambiance sombre de l’univers. Nous avons l’impression que les personnages sont constamment malheureux et robotisés.
L’autre tare du jeu est sa traduction française désastreuse. Certaines phrases ne veulent rien dire, et globalement on a vu mieux même en termes d’adaptation française low cost. On en a la certitude grâce aux rares doublages que l’on peut entendre. Le narrateur ou encore les quelques dialogues, comme la propagande sonore dans le jeu, sont affreusement mal doublés. Nous n’avons rien contre l’accent de nos amis québécois, mais le ton du narrateur sonne affreusement faux. Pour certains dialogues, nous avons l’impression qu’il a été confié à un anglo-saxon parlant à peine le français. Si vous en avez la possibilité, on conseille vivement de passer le titre en version anglaise.
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